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Page:Revue des Deux Mondes - 1908 - tome 46.djvu/65

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soulagement à votre tristesse, mais je n’en sais point d’efficace[1].

Le temps et l’étude émoussent peu à peu ce que la douleur a d’aigu. Vous saurez user de ces palliatifs. J’espère que la santé de Mme de Lavergne n’a pas souffert de cette cruelle épreuve ; dites-lui, je vous prie, que personne ne comprend mieux que moi son chagrin et n’y compatit davantage. J’ai perdu, il y a dix-huit ans, un fils de vingt et un ans excellent et charmant. Son image est toujours là devant mes yeux, et je le cherche encore comme si je devais le retrouver.

Je suis encore ici pour quinze jours. J’achève mon Histoire du Protectorat de Richard Cromwell et du rétablissement des Stuarts ; il ne m’en restera plus à écrire à Paris que les vingt ou trente dernières pages. Je souhaite que le public s’y amuse autant que je m’y suis amusé. C’est de la grande comédie sans grands hommes ; je resterais volontiers ici bien plus longtemps et j’y reprendrais d’autres travaux, mais je suis obligé d’être à Paris vers la mi-novembre.

Ce que je retrouverai avec un vrai plaisir à Paris, c’est l’Institut.

Il y a là le mouvement et le repos d’esprit, et j’en jouis beaucoup. Je serai charmé d’en jouir avec vous ; je ne vous envoie point de nouvelles. Voici les dernières lignes que j’ai reçues hier de Paris : « Le vent est à la guerre, à une guerre terrible. Rien ne saurait résister à ce que veulent deux grandes puissances comme la France et l’Angleterre, quand elles veulent bien. On prendra Cronstadt, on inventera, on parviendra. On ne voudra plus souffrir de neutres. Le printemps sera terrible. » Je répète toujours ma question : Et après ? Il n’y a de sensé que la paix ou la conquête.


1856


Val-Richer, 3 août 1856.

J’ai à vous remercier d’abord des volumes que vous avez bien voulu m’envoyer et où j’ai trouvé deux ou trois petits renseignemens qui me manquaient ; puis, et surtout, de votre excellent article : l’Agriculture et la Paix, vraiment excellent.

  1. Lavergne avait perdu son beau-fils, M. Charles Persil.