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me semble. Vous en êtes-vous bien trouvé ? Si vous y avez eu aussi peu de soleil que nous en Normandie, le séjour n’aura pas été très gai. Heureusement pour moi, ma gaîté, si ma disposition peut s’appeler de la gaîté, ne dépend pas du tout du temps qu’il fait. Je jouis vivement du beau temps quand il est là, et je n’y pense guère quand il n’y est pas. Même dans mon loisir d’aujourd’hui, j’ai trop de choses à penser et à faire pour donner dans ma vie beaucoup de place au désir de ce qui me plairait ou au regret de ce qui me manque.

La conférence de Bade a été un coup manqué. La Prusse ne s’est pas laissé tenter à l’exemple du Piémont. Le prince régent s’est montré bien Allemand et les petits souverains allemands, les étudians allemands, le peuple allemand se sont plu à l’entourer et à le grandir. Lui seul a quitté Bade content. Lord Palmerston racontait chez lui, il y a quinze jours, cet apologue :

« J’avais un ami qui faisait la cour à une belle personne ; il s’en croyait bien accueilli et il avait quelque droit de le croire, car, après bien des sollicitations, il avait obtenu d’elle un rendez-vous en maison tierce. Il s’y est rendu avec empressement ; on l’a introduit ; il s’est trouvé en présence d’une réunion de parens qui l’ont reçu avec courtoisie, mais comme un étranger ; il s’est aperçu qu’il gênait autant qu’il était gêné ; il s’est retiré, on l’a reconduit poliment. Il parle peu de sa rencontre. »

Vous voyez où en est Garibaldi, aussi embarrassé des Siciliens qu’embarrassant pour M. de Cavour. Ils ne se brouilleront pourtant pas. Le chaos italien suivra son cours.

Si le roi de Naples était homme d’esprit et de courage, la partie ne serait pas mauvaise. Mais à Paris, la guerre est entre M. Baroche et M. de Morny ; l’un veut que le Corps législatif obéisse toujours ; l’autre qu’on le laisse un peu tranquille.


1861


Val-Richer, 4 juillet 1861.

Mon cher confrère, si la goutte vous avait rendu comme au duc de Broglie le service de vous débarrasser d’un asthme très pénible et très fréquent, je vous plaindrais un peu moins ; mais la goutte gratuite doit être une rude épreuve de patience.

Le duc a eu meilleur marché du Préfet de police que de la goutte. Son affaire a fini par une déclaration de non-lieu qui ordonne