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restituer, — certaines créations, pieuses ou charitables, célèbres, et en dépouiller les particuliers derrière lesquels sa modestie habile s’était, de propos délibéré, dérobée. De même qu’à regret M. Raoul Allier a dû disputer à saint Vincent de Paul une part de son œuvre, de même ici, c’est à l’abbé Emmanuel Pachier, chanoine théologal de l’Église cathédrale, qu’il ne faut plus laisser l’honneur total de l’Hôpital général de Marseille. Nous connaissons à présent cette « quantité de personnes de qualité, » dont parle un des historiens anciens les mieux informés de cette ville : Antoine de Ruffi, membre de la Compagnie peut-être ; personnes qui, « non contentes d’avoir largement ouvert leurs bourses en cette pieuse occasion, avaient aussi beaucoup travaillé pour l’acheminement de cette bonne œuvre. »

Il en est à peu près de même[1] de l’Hôpital des forçats malades, dont le groupe marseillais s’occupe en 1643.

C’est Philippe-Emmanuel de Gondi, le père du cardinal de Retz, général des galères de 1598 à 1627, qui, dès 1618, à l’instigation, peut-être, de saint Vincent de Paul, son ami et son conseiller, avait « jeté les fondemens » d’un petit hôpital pour les galériens malades. Mais l’achèvement, c’est à Jean-Baptiste Gault, évêque de Marseille de 1639 à 1643, à la duchesse d’Aiguillon, à Gaspard de Simiane, chevalier de La Coste, que les histoires ont coutume de l’attribuer. Ce serait Jean-Baptiste Gault surtout, d’après les historiens de l’Oratoire et ceux de l’épiscopat marseillais, qui, le premier, aurait compris que « l’une des plus grandes compassions qu’il y ait dans les galères est de voir les pauvres forçats, durant leurs maladies, abandonnés corporellement et spirituellement…, » demeurant « avec la fièvre chaude, attachés sur le banc où ils pourrissent dans l’ordure. » Il en avait parlé, dès « avant que de partir de Paris, » au cardinal de Richelieu et à la duchesse d’Aiguillon ; presque aussitôt son arrivée à Marseille, il en négocia l’établissement à l’aide du chevalier de Simiane, et, la chose étant conclue, lorsqu’il fallut arrêter le plan sur le terrain, le dévoué prélat, raconte son biographe, ne prit pas garde qu’il était « tout en eau pour s’être extraordinairement échauffé dans un sermon, » et qu’il faisait dans le lieu du rendez-vous « un vent

  1. Voyez les Vies des P.-P. de l’Oratoire du P. Cloyseault et les Mémoires sur l’Oratoire du P. Batterel, publiés par l’abbé Ingold, et la Vie de J.-B. Gault, par Marchetty.