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bons anges, en cette saison en laquelle il y a tant d’hommes sur la terre qui font l’office des diables, et nous induisons et excitons l’un l’autre à deffendre les interests de Jésus-Christ si peu considérez par les pécheurs !… Il nous défendra de nos ennemis, et nous donnera s’il lui plaist un courage tel qu’il le faut…

… Le Saint-Esprit descendu en forme de langue de feu le jour de la Pentecôte sur les Apostres, veuille ouvrir vostre bouche et embraser vostre cœur pour jamais ! — Dans les pressans besoins on recherche des extrêmes remèdes ; Dieu, qui console les affligez, vous veuille… inspirer deux fonctions, celle de Prophète et de Législateur ; — de prophète, portant toute votre ville à la pénitence par vostre prédication, ainsi que fit Jonas ceux de Ninive ; — de législateur, détournant la main vengeresse du Seigneur des armées de dessus nos testes, ainsi que fit Moïse lorsqu’il empescha ce grand Dieu de consommer et de réduire à rien le peuple d’Israël après qu’ils eurent adoré le Veau d’Or. Soyez ambassadeurs et députez du peuple de vostre ville vers le grand Roy des Roys, Jésus-Christ notre Sauveur ! Prenez le feu de la Sainte Charité dans son sacré costé, et l’allumez dans leurs cœurs afin qu’ils le conservent jusques à la fin de leurs travaux !


Parmi ces œuvres, auxquelles Paris convie éloquemment Marseille, celle du combat anti-protestant tient une place très grande, — trop grande. — Non pas que, la première fois que le groupe parisien écrit au groupe marseillais à ce sujet, ce ne soit d’une façon assez douce (lettre du 17 décembre 1644) : il se borne à demander les prières de Marseille, « afin que Dieu illumine Messieurs de la Religion Prétendue Réformée » dans leur prochain synode, et qu’il les fasse « demeurer dans les termes de l’obéissance qu’ils doivent à Dieu et au Roy. » Mais dès le mois de mars 1645, le ton change. Les événemens d’Angleterre « affligent bien fort » la Compagnie. « Nous sommes avertis que la religion catholique est à la veille d’être entièrement abolie en Irlande, » que les Parlementaires et les Écossais se joignent « pour faire la guerre aux Irlandais catholiques. » Et comme la Compagnie a également, dit-elle, — et nous l’en croyons aisément, — « une parfaite connaissance » des secours d’hommes et d’argent qu’envoient à leurs coreligionnaires anglais les Réformés de France et d’Angleterre, elle se met à organiser une action contraire. Elle commence par donner avis aux Marseillais que l’archevêque de Paris « a ordonné à tous messieurs les curés de représenter secrètement à leurs paroissiens » le danger couru par le catholicisme et l’importance des efforts à faire. Bientôt après (4 janvier 1646), elle leur expose la tactique, plus efficace, qu’elle a inaugurée elle-même : cette campagne de chicanes et