Travail, après l’article de M. Paul Leroy-Beaulieu que nous avons publié il y a quinze jours. La Confédération générale du Travail est peu de chose si on regarde sa composition ; son comité directeur est formé d’un très petit nombre de personnes dont la notoriété est toute nouvelle et dont la capacité intellectuelle est certainement médiocre ; mais c’est là que viennent converger comme à leur centre un grand nombre de syndicats, et c’est de là que partent, comme d’un sanctuaire mystérieux, des ordres qui sont aveuglément suivis. Il suffit que la Confédération générale ait pris une décision pour que tous les syndicats qui s’y rattachent l’exécutent aussitôt. La Confédération a voulu venger le prolétariat, victime de l’incident de Draveil, et elle a décidé qu’une grève de vingt-quatre heures aurait lieu : elle voulait donner un avertissement à la classe capitaliste et au gouvernement. Si les grévistes s’étaient contentés de se croiser les bras et étaient restés tranquilles à Paris, le mal n’aurait pas été bien grand ; mais la Confédération entendait la chose autrement. Elle a assigné un rendez-vous aux grévistes, et ce rendez-vous a été à Villeneuve-Saint-Georges. On a fait converger sur ce point tout un afflux d’ouvriers qui y étaient étrangers et y venaient seulement pour manifester. Dès le matin, les trains partis de Paris y ont conduit des milliers d’ouvriers ; d’autres étaient venus à pied ; tous avaient apporté des vivres et malheureusement des munitions. Il s’agissait, en effet, d’un premier essai de mobilisation en vue de la guerre sociale. On sait ce qui s’est passé. Quand les ouvriers se sont vus assez nombreux, ou peut-être quand l’heure fixée d’avance a sonné, le combat a commencé. Personne ne conteste que les ouvriers aient tiré les premiers : ils ont fait feu sur la troupe ; ils l’ont accablée de pierres et généralement de tous les objets contondans qui leur tombaient sous la main ; ils ont à la hâte dressé des barricades. Tout cela a été fait gauchement, lourdement, mais résolument, et si la troupe, dirigée et contenue par des officiers pleins de sang-froid, n’avait pas montré une patience et une endurance admirables, le mal aurait été infiniment plus grand. Le nombre des morts n’a été que de deux ou de trois : celui des blessés, d’un côté comme de l’autre, a été beaucoup plus élevé.
Quel était le but de la Confédération générale du Travail ? Elle n’a que dédain et mépris pour le socialisme parlementaire et pour l’action légale ; la nullité de l’un et l’inefficacité de l’autre sont démontrées à ses yeux ; ce qu’elle veut, c’est l’action directe, l’assaut subit et impétueux livré à la société capitaliste, enfin le retour aux vieux