évidente, peut-être involontaire, car peu d’entre eux se sont donné la peine d’étudier une question qu’ils ne connaissaient pas. La plupart s’imaginent que l’Académie conserve sur les pensionnaires élus par elle quelque autorité. Il y a bel âge que ceux-ci ne doivent plus être considérés comme des élèves auxquels elle pourrait prescrire des doctrines que les directeurs auraient pour mission de faire observer rigoureusement. Ainsi qu’on peut le voir en parcourant la correspondance de ces directeurs avec les Surintendans des Bâtimens, il ne s’agissait pas seulement autrefois d’une pression morale exercée sur les pensionnaires et à laquelle ils devaient céder. La menace d’un emprisonnement de plusieurs mois au For-l’Evêque pouvait, au besoin, servir de sanction, pour mettre à la raison les récalcitrans. Mais les choses ont bien changé depuis lors. En même temps que la composition même de l’Académie des Beaux-Arts, la façon dont elle comprend le rôle qui lui est dévolu, exclut désormais toute idée d’une doctrine officielle imposée par elle aux pensionnaires de la Villa Médicis. Ses rapports avec eux se réduisent à l’appréciation tout à fait platonique de leurs envois annuels, et à la surveillance de plus en plus illusoire du règlement qui devrait les régir et dont, malgré sa douceur croissante, certains de ces pensionnaires réclament périodiquement l’abrogation. Et cependant de quelles contraintes ont-ils encore à se plaindre ? L’action d’un directeur, quel qu’il soit, sur les travaux des pensionnaires est absolument nulle : son rôle est purement moral. S’il a su, par l’affection qu’il leur montre, gagner la confiance de ces jeunes gens, tout au plus parviendra-t-il à leur faire accepter quelques conseils sur la conduite de leur vie, à les défendre contre les entraînemens auxquels ils sont exposés, et à faire valoir auprès d’eux les précieuses ressources qu’ils trouvent réunies pour leur instruction pendant leur séjour à Rome, au milieu d’une nature admirable, entourés, comme ils le sont, de chefs-d’œuvre de toute sorte. C’est déjà là une tâche assez utile et qui exige de rares qualités de tact et de dévouement.
Sans pouvoir compter sur le respect et la reconnaissance de ses pensionnaires, leur directeur doit se consacrer tout entier à leur service. Certes, il en est encore parmi eux qui sont sérieux et pleins de conscience, qui comprennent les devoirs de leur situation et les nombreux avantages qu’elle leur offre. Mais