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Un défilé d’anciens visages,
Beaux ou laids, fixes ou furtifs,
Parmi des monumens pensifs
Et d’adorables paysages,

Chaos d’éclairs qui roule et luit
Dans ma cervelle illuminée,
Aussi profond que la traînée
Des astres à travers la nuit !

Etrange et superbe mystère
Qui, dans le coin d’un os grossier,
Agite l’univers entier :
Quelle ivresse, ô roi de la Terre !

Mystère étrange, horrible sort
Qui, demain, en une seconde.
Va dissoudre ce petit monde :
Quelle pitié, fils de la Mort !


RARA AVIS


L’heure exquise, le soir, c’est l’heure du silence,
Du cher silence, après les bruits de l’action,
Quand tout ce que le jour soulevait d’espérance.
D’illusion stérile et d’âcre passion

Retombe au fond de l’âme, ainsi que les poussières
Sur la grand’route où piétinaient les longs troupeaux,
Pour que l’horizon pur, sous l’adieu des lumières
S’éteigne en un sourire avant le grand repos.

Bleus ou noirs, tous les incidens de la mêlée,
Confusément, d’abord, et par gros tourbillons,
S’éparpillent dans la mémoire encor troublée.
Vol banal et fuyard d’inquiets oisillons :