sanctionne l’extension de l’autorité germanique sur la Bosnie et l’Herzégovine.
Dans ce même discours « éloquent, » où lord Beaconsfield repoussait l’idée d’un « partage, » tout en s’y résignant, il revendique, comme une initiative britannique, l’idée de mettre ces deux provinces aux mains de l’Autriche-Hongrie. Ce n’était pourtant, au fond, que l’application de la convention de Reichstadt. L’Autriche-Hongrie obtenait le paiement de sa sage et prudente conduite pendant la guerre.
Voici comment lord Beaconsfield arrange les choses devant l’aréopage :
Son Excellence saisit cette occasion pour repousser les insinuations d’une partie de la presse qui a qualifié de « partage » la décision du Congrès au sujet de la Bosnie et de l’Herzégovine. C’est, au contraire, pour prévenir un partage que cette décision a été prise. De nombreux précédens historiques la justifient : la Bosnie abandonnée à elle-même, sans élémens de bon gouvernement, entourée d’États indépendans ou demi-indépendans, eût été, en bien peu de temps, le théâtre de luttes sanglantes. Dans cette intention, la Grande-Bretagne a fait appel à une puissance voisine, forte et intéressée au maintien de la paix : l’Europe, partageant la même pensée, a remis à l’Autriche-Hongrie l’occupation et l’administration de la Bosnie. Son Excellence rappelle que plusieurs fois, soit dans des pays voisins, soit ailleurs (en Italie et en Belgique probablement), une telle mission a été confiée à l’Autriche : l’initiative de la Grande-Bretagne ne prouve donc pas qu’elle soit favorable à un partage…, etc.
Et voici, maintenant, ce qui s’était passé : dès le début des complications, l’Autriche-Hongrie avait jeté son dévolu sur les deux provinces : elle avait fait connaître son intention de ne laisser, à aucun prix, l’influence slave se développer dans le Balkan occidental. A Reichstadt, la Russie, éclairée sur les desseins de l’Autriche, y avait adhéré, en sacrifiant à la fois la Serbie et, un peu, le Monténégro[1]. Depuis, le prince de Bismarck
- ↑ Carathéodory pacha donne un détail précis et curieux sur l’entente de Reichstadt : « Il est bon de noter que l’origine de cette question (Bosnie et Herzégovine) remontait, s’il faut en croire certains récits, à l’entrevue des empereurs, à Reichstadt, en juin 1876. Du moins, c’est ce qui a été affirmé sous serment par M. Kogalniceano. Ce dernier a déclaré avoir eu entre les mains deux documens écrits au crayon, l’un par le prince Gortschakoff, l’autre par le comte Andrassy et échangés entre eux à Reichstadt ; les deux écrits, qui étaient formulés comme de simples exposés d’idées, admettaient, dans l’hypothèse d’une guerre russo-turque, la rétrocession de la Bessarabie à la Russie et l’extension de l’Autriche en Herzégovine-Bosnie. Plusieurs énonciations de lord Salisbury, pendant les discussions officielles et privées, donnent lieu de croire que l’Angleterre, de son côté, s’était familiarisée avec cette idée, à l’époque des conférences de Constantinople… »