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supprimera-t-on comme le proposent les Allemands ? On peut prévoir ici une discussion très vive. Les divers États de l’Union arrivent en effet à la Conférence avec des idées et des législations très variées sur le droit de traduction. Presque tous, on l’a vu, ont admis la modification de 1896 à la Convention de Berne, pour les rapports internationaux. Dans leurs lois intérieures, plusieurs, dès à présent, reconnaissent le droit absolu de l’auteur sur la traduction, tel qu’il figure dans le projet allemand : ce sont la France, l’Allemagne, la Belgique, Monaco, la Tunisie ; d’autres, Angleterre, Danemark, Luxembourg admettent chez eux le régime de la révision de 1896 : la traduction pareille à toute reproduction, sous réserve qu’elle ait été faite dans les dix ans. Ces derniers États, moins protecteurs jusqu’ici, pourront être convaincus à Berlin par la France, l’Allemagne, la Belgique qui le sont davantage. Le nouveau texte aurait ainsi des chances de recueillir une grande majorité de signatures. Mais deux puissances semblent devoir résister : la Suède et la Norvège. Elles ont en effet refusé d’accepter la modification de 1896, et elles en sont encore à la Convention de 1886, la simple protection du droit de traduction pendant dix années. Comment obtenir d’elles qu’elles franchissent la distance qui les sépare de la protection complète du projet allemand, sans s’arrêter au degré intermédiaire où les autres États sont depuis 1896 ? Il faut l’essayer bien entendu : tous ces autres États y sont grandement intéressés, et ce serait un beau succès pour l’éloquence de nos délégués, que de faire accepter à la Suède et à la Norvège la reconnaissance du droit absolu de traduction.

Si toutefois l’accord ne peut se faire, ce demi-échec aura ses compensations. On ne saurait oublier que, par delà les États Scandinaves, il existe de grands, de très grands pays, les États-Unis, l’Autriche-Hongrie, la Russie, qui n’ont pas encore adhéré à l’Union, et qu’il importe d’y attirer. Or des mesures très strictes, comme la protection absolue du droit de traduction, seraient de nature sans doute à les inquiéter, à les éloigner. On peut espérer, au contraire, que des règles simples, comme celles de la Convention primitive, finissent par leur paraître acceptables. Il est donc utile, nécessaire même de garder, à côté de la Convention meilleure et plus sévère, préparée par l’Allemagne, le texte de la Convention de 1886. Les États de l’Union se trouveront groupés dans l’avenir à peu près comme ils le sont