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Page:Revue des Deux Mondes - 1908 - tome 48.djvu/475

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les privilèges du consul allemand ont été méconnus ; les autorités françaises doivent avant tout en exprimer des regrets ; nous infligerons ensuite à notre consul le blâme qu’il a d’ailleurs si bien mérité. — Eh quoi ! demandions-nous, vous reprochez la conduite qu’ils ont tenue à nos officiers et à nos soldats ? — Non pas précisément, répliquait le gouvernement impérial ; mais enfin notre consul était lui aussi dans son droit, quoiqu’il en fût sorti, et par conséquent il convient que la France exprime des regrets au sujet des violences dont il a été l’objet. — Posée dans ces termes, la question était insoluble ; tout le monde l’a senti et, du jour au lendemain, il y a eu en Europe une impression de malaise ; on s’est demandé ce que voulait l’Allemagne, et les bruits les plus pessimistes ont commencé à courir. Pourtant, le calme des esprits dans les deux pays, le sang-froid qui continuait d’y régner, le ton de la presse qui demeurait courtois et conciliant faisaient espérer un arrangement final. Il y avait une autre raison de le croire. Les gouvernemens, dans les conflits qui s’élèvent entre eux, ne sauraient aujourd’hui se passer de l’opinion, et celle des peuples se forme sur des idées simples. Le peuple allemand, qui aime la paix [et qui en a besoin, aurait admis difficilement que son gouvernement l’exposât aux horreurs de la guerre à propos de deux déserteurs, c’est-à-dire de deux misérables aussi indignes de son intérêt que du nôtre ! Nous savons bien qu’une guerre déterminée par des raisons profondes parait l’être, quelquefois, par un simple prétexte ; mais encore faut-il que le prétexte soit présentable, et nous laissons à l’opinion universelle le soin de juger si l’arrestation de deux déserteurs de nationalité allemande aurait eu ce caractère.

Le gouvernement de la République a eu, au contraire, avec lui l’opinion de la France entière, de tous les pouvoirs publics, de tous les partis, de tous les journaux, lorsqu’on a su qu’il se refusait à exprimer les regrets qu’on exigeait de lui. Il s’y est refusé, d’abord, parce qu’il estimait que ses soldats avaient fait leur devoir à Casablanca ; ensuite, parce que, après avoir accepté que l’affaire fût portée devant la Cour de La Haye, il entendait qu’elle le fût tout entière, sans distinction artificielle entre la question de droit et la question de fait. L’une et l’autre sont si étroitement liées, qu’on n’aurait pu les séparer sans rendre inutile, au moins en ce qui nous concerne, le recours à l’arbitrage. Après quelques jours de conversation, le gouvernement impérial nous a proposé un échange. simultané de regrets : les nôtres auraient porté sur la violation des privilèges du consul allemand, les siens, sur l’abus que ce consul avait