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cependant leur plaidoyer avec les raisons suivantes : — Le Polonisme est devenu un danger pour l’Etat prussien, parce que les Polonais font leurs affaires avec une extraordinaire énergie et un patriotisme admirable. Si les Allemands se comportaient de même, point ne serait besoin d’expropriation[1]. La meilleure sécurité, dit expressément le rapporteur de la Commission de la Chambre des seigneurs, serait dans le loyalisme des Allemands qui habitent les provinces de l’Est[2]. Ce sont les mesures vexatoires qui ont fait le bloc polonais. L’école allemande a fait du jeune paysan polonais un concurrent supérieur au jeune paysan allemand, parce qu’il parle deux langues. Il fallait laisser les Polonais parler polonais et leur apprendre à se sentir Allemands ; mais les tracasseries policières sont une mauvaise méthode pédagogique[3]. Que feront les dures lois d’exception ? Elles rendront plus fort, plus violent, plus redoutable le « radicalisme » polonais et n’intimideront que les élémens pacifiques et loyalistes. Elles n’atteindront pas les meneurs, les agitateurs qui sont aujourd’hui dans les villes, journalistes, avocats, etc.[4]. On veut réduire à néant un adversaire politique en ébranlant la base économique sur laquelle il s’appuie, et on lui donne des moyens d’action beaucoup plus redoutables. L’expropriation le rendra plus mobile ; chassé de la campagne, où il est plus ou moins accessible à l’influence bienfaisante des autorités locales, il ira à la ville combattre le commerçant allemand[5]. Au prix actuel des terres, 70 000 hectares expropriés mettront 90 millions dans les poches des Polonais[6]. On ne peut pas expatrier quatre millions d’hommes, et l’on n’a pas d’ailleurs les milliards nécessaires pour résoudre le problème par l’argent. Un représentant de l’Est cherche en vain, depuis trente ans qu’il est dans la vie publique, quel crime ont bien pu commettre les Polonais. Traîtres à la patrie ? Mais quand donc leur a-t-on fait un procès de ce chef ? Il y a pourtant des juges à Leipzig. Pour prouver la puissance de pénétration des Polonais, on cite

  1. Bericht der IX Kom., p. 35.
  2. Id., p. 5.
  3. Chambre des seigneurs, Stenog. Berichte, 30 janvier 1908, p. 35 (Dr Bender, bourgmestre de Breslau).
  4. Bericht der IX Kom., p. 6.
  5. Chambre des seigneurs, Stenog. Ber., 30 janvier 1908, p. 32 (comte de Tiele-Winckler).
  6. Ber. der IX Kom., p. 6.