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Claude Fauriel à Mary Clarke.


Paris, 22 août 1822.

Je suis toujours garde-malade et garde-malade inquiet ; et je suis de plus moi-même toujours un peu malade. Mais quant à moi, ce que j’ai n’est rien que je ne connaisse déjà pour l’avoir éprouvé d’autres fois ; c’est peu de chose, et cela se passera, je l’espère, sans avoir besoin d’autre remède que d’un peu de patience : ainsi donc, chère douce amie, n’ayez aucune inquiétude sur moi : je ne vous parle de cela que pour vous expliquer pourquoi je ne vous écris plus aussi fréquemment que je le projette toujours, et pourquoi il peut se glisser dans mes lettres quelques teintes de la tristesse que je combats, mais qui est parfois plus forte que moi. Si vous étiez ici, une partie du chagrin que j’éprouve me resterait, mais j’aurais pour me soutenir un sentiment de bonheur, des consolations, des paroles, des regards, des assurances, mille choses enfin que je n’ai pas, et que je ne puis me figurer aussi vivement que j’en aurais besoin. Dans la triste disposition où je suis, je n’ai, pour me consoler, que des souvenirs et une espérance ; et puis un. peu de travail qui me coûte et me fatigue, parce qu’il est un peu le fruit d’une violence que je me fais, pour ne pas me laisser trop aller à celle de mes impressions qui m’affligent...


Mary Clarke à Claude Fauriel


Keswick, le 8 septembre.

Qu’est-ce que Mme de Condorcet ? Je ne savais pas que la maladie d’aucune dame avait le pouvoir de vous rendre malade. Que vous est une dame dont la maladie vous affecte plus que sa propre famille ? qui vous empêche de m’écrire ? J’avoue que le commencement de votre lettre m’a tellement étonnée, que j’ai eu peine à fixer mon attention sur le reste, et quoique le reste, soit aimable, je ne puis surmonter le commencement même depuis plusieurs jours. Je vous ai écrit le jour même où j’ai reçu votre lettre, dans toute l’amertume de ma première impression ; mais, grâce à Dieu, je l’ai gardée et, l’ayant lue le lendemain