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était divisée en une foule de principautés dont les chefs ou sobos reconnaissaient la suzeraineté des souverains birmans qui entretenaient un délégué dans chacune de leurs capitales. L’influence de ces délégués était d’ailleurs plus nominale que réelle. Protégés par la nature montagneuse des pays, par la difficulté des communications, les sobos étaient presque indépendans ; ils dévastaient la contrée par leurs incessantes querelles, négligeaient d’envoyer à Mandalé les fleurs d’or et d’argent témoignages de leur vassalité. Myngoon trouva chez le plus puissant d’entre eux, le chef de Moné, un cordial accueil. Les témoignages de respect que lui prodiguait son hôte, les protestations de dévouement que lui apportaient les envoyés des sobos voisins dès son arrivée à Moné, la faiblesse des liens politiques rattachant la région au roi de Birmanie firent concevoir au prince un projet audacieux. Il rêva de pacifier le pays Karini par le groupement de ses nombreux chefs en une confédération indépendante dont il serait le souverain et dont les destinées pourraient être brillantes : le nouvel État ne tarderait pas à progresser vers l’Est et vers le Nord, réunissant sous la suprématie d’un prince aussi actif qu’intelligent les pays chans de Birmanie et du Siam. Mais les négociations préparatoires que Myngoon essayait d’engager furent bientôt connues du commissaire royal en résidence à Moné. Ses rapports alarmèrent le roi Min Doon qui, tranquille désormais dans le bassin de l’Irraouaddy depuis la deuxième révolte et l’exécution de Padan Min, voulut prévenir ou combattre ce qu’il croyait être une nouvelle rébellion de son fils aîné. Par son ordre, 8 000 hommes environ de troupes royales se concentrèrent sur les frontières septentrionales du pays Karini pour s’opposer à la réalisation des desseins de Myngoon.

Celui-ci néanmoins n’était pas aussi redoutable qu’on le croyait à Mandalé. Son projet de confédération des sobos chans et karini s’annonçait déjà comme impraticable. Si les populations éprouvaient pour le prince une vive sympathie, leurs chefs ne désiraient pas se donner un maître qu’ils devinaient impérieux ; ils ne s’accoutumaient pas à l’idée de vivre en paix avec leurs voisins, alors que tant d’anciennes querelles n’étaient pas terminées. Myngoon avait donc à vaincre des méfiances, calmer des susceptibilités ; l’approche des troupes royales compliquait encore sa tâche en modérant l’ardeur de ses partisans.

Sur ces entrefaites, des nouvelles inattendues apportées par