Une guerre appelle une guerre ;
La dague au fourreau ne tient guère.
Dans chaque rue, un assassin ;
Dans le ciel rouge, le tocsin.
Un moine peint dans sa cellule,
Au fond de son couvent qui brûle.
Assemblés à l’Eglise, on rit
De Dieu même, entre gens d’esprit.
De l’Evangile qu’on torture
Il sort des lois contre nature.
Jésus n’est plus Dieu des pitiés ;
Les meilleurs sont des châtiés.
Et lorsque, de cette géhenne
Où toute âme est une âme en peine,
Grands seigneurs ou popolani,
Chacun tour à tour est banni,
Alors on tourne vers Florence
Des yeux où pleure l’espérance :
Tous ont pour elle un cœur d’amant ;
Tous, ils l’aiment férocement,
La mère en deuil, noire et sanglante.
Et c’est bien la cité dolente.
C’est le chaos de feu, de fer.
Où Dante concevra l’Enfer.
C’est dans cette fumée ardente
Que Dieu forgea l’âme du Dante ;
Et Dante, en ce lieu tourmenté,
Rêve d’une calme beauté.
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