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ma langue, mais mon estomac est ingouvernable ; et malheureusement, depuis que j’ai quitté Paris, j’ai pour ainsi dire pris ce mal, je crains, d’une manière invétérée. Les eaux n’y font rien jusqu’à présent. Si j’étais restée en place, je ne l’aurais pas eu, car ce que j’éprouvais à Paris n’était rien, absolument rien. C’est maintenant que je puis en juger ; il me faudrait le plus parfait repos, et ma position me le rend impossible, et mes amis ou ma manière de les aimer encore plus. Mais je ne puis regretter d’être venue, car maman n’est plus la même personne : toutes ses douleurs sont parties dès le deuxième bain ; mais elle a craché le sang et en a été malade de la poitrine. Depuis, elle les a pris avec plus de précautions, et elle n’en a éprouvé que les avantages. Elle est aussi infiniment plus gaie. En somme, ces eaux sont miraculeuses.


Claude Fauriel à Mary Clarke.


Dieppe, 5 septembre au soir, 1831.

Chère amie, je reçois tout à l’heure seulement votre lettre du 24 août et j’y réponds à l’instant, sans savoir où adresser ma réponse, car il me semble que les calculs de temps que vous avez faits ne sont pas des plus justes. Votre lettre commence par des reproches ; c’est chose de fondation avec vous ; je n’y réponds pas : je ne veux pas gâter davantage le plaisir que m’a fait votre lettre, dont j’avais grand besoin. Je commençais à être inquiet de vous et de votre maman ; et ne sachant pas vos marches, je ne savais où vous écrire. Jetais sur le point d’envoyer un mot pour vous à Mohl, plus à portée de savoir de vos nouvelles et de vos projets. Je suis désolé de ce que vous me dites de vos terribles maux d’estomac : cela me gâte le plaisir de vous savoir dans de beaux pays pleins de choses faites pour vous intéresser. C’est encore bien heureux que vous ayez du plaisir à aller à cheval : il y a une multitude de petites courses que vous pourrez faire de la sorte ; mais ces maudites grandes routes ? J’ai trop besoin d’espérer que vous serez un peu soulagée d’ici là, pour ne pas l’espérer. Du reste, je partage bien votre contentement de voir que votre maman retire de son voyage le fruit qu’elle en attendait, et que les sacrifices que vous aurez faits pour cela ne seront pas perdus.