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on les appelait, buissonnières qui furent interdites et traquées avec persévérance. Toutefois il y a toujours des lieux et des momens où les animosités les plus vives se refroidissent et arrivent à des compromis. C’est sous l’empire de la lassitude qui les avait amorties que fut rendu l’Édit de Nantes. La liberté d’enseignement y était réglée, comme toutes les questions qui divisaient les deux communions, par le privilège. Les dissidens ne pouvaient ouvrir des établissemens scolaires publics que là où l’exercice public de leur religion leur était également permis. En dehors de ces écoles confessionnelles qui s’établissaient parfois au mépris de la condition que nous venons de dire, ils avaient le choix d’élever leurs enfans chez eux, dans leurs croyances, ou de les laisser partager avec les élèves de la religion dominante les mêmes exercices et le même traitement. Plus d’une famille protestante ne se faisait pas scrupule de faire élever ses filles au couvent et dans la religion catholique. Tel fut le cas, par exemple, de la mère du Père Joseph, Marie de La Fayette. A Casteljaloux, en 1590, l’instituteur enseignait, dans la même école, les deux religions. Un candidat au poste d’instituteur au Buis (Drôme), qui était protestant, allant au-devant de l’objection qu’on pourrait tirer de sa religion, rassure les familles catholiques en déclarant qu’il instruira leurs enfans aussi bien que ceux des dissidens dans leur religion respective. Sous Louis XIII, dans les villes dont la population était mixte, les écoles publiques devinrent, comme les consulats, mi-parties, c’est-à-dire que le personnel enseignant appartenait à l’une et à l’autre des deux communions.

Nous venons de parler de l’Édit de Nantes. C’est de cette transaction imposée par Henri IV aux passions religieuses qu’on est convenu de faire partir la période de pacification intérieure, d’activité économique, d’essor moral qui a réparé le passé et fécondé l’avenir. Adoptons aussi ce relais historique, plaçons-nous en 1598 pour arrêter l’état où se trouvait l’éducation féminine, pour nous demander ce que les jeunes filles qui avaient achevé à cette date leur éducation pouvaient apporter à une société toute frémissante encore des convulsions qu’elle avait subies, impatiente de se fixer dans l’ordre, dans l’effort laborieux, de se tracer, pour se guider sur sa route, un idéal nouveau.

Les guerres d’Italie, la Renaissance avaient donné à la culture