Page:Revue des Deux Mondes - 1909 - tome 49.djvu/339

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

adoptant la clôture et les vœux solennels, un ordre monastique.

Quand un grand besoin social se fait sentir, quand ce besoin croit avoir trouvé, pour se satisfaire, la forme la mieux appropriée, on voit naître une émulation qui s’ingénie à la diversifier, à la perfectionner. On voulait des femmes instruites, mais on les voulait instruites comme des éducatrices religieuses peuvent instruire, c’est-à-dire avec la préoccupation dominante de régler la vie, de fortifier contre les entraînemens, d’apprendre les bienséances nécessaires pour assurer à chacun son autonomie sociale. Des congrégations se fondent exprès pour enseigner, d’autres ajoutent cette tâche à la vocation spirituelle et charitable qu’elles se sont déjà donnée, les unes et les autres se disputent la confiance des familles. Chacune apporte dans sa mission éducative un esprit particulier. La Visitation, par exemple, distille pour ses élèves le miel nourrissant et suave que la force et l’onction de son fondateur et de sa fondatrice lui ont infusé. Le premiers tiers du XVIIe siècle voit se succéder les sœurs de Notre-Dame de l’Observance ou du Sacré-Cœur, les Filles de la Croix, les Filles de Notre-Dame, les sœurs du Bon Pasteur, les sœurs de Sainte-Geneviève, les sœurs de Saint-Joseph, les sœurs de la Présentation, les Filles de la Providence, les Calvairiennes, etc. Beaucoup de ces associations se sont formées spécialement dans l’intérêt de la classe populaire à laquelle elles procurent l’instruction ménagère et professionnelle.

On ne peut constater le succès de l’enseignement congréganiste, qu’il s’adressât au peuple ou aux sphères supérieures, sans se demander s’il ne s’explique pas en partie par l’insuffisance des autres institutions pédagogiques. Cette question met en cause les petites écoles, c’est-à-dire les établissemens qui, sous l’autorité de l’épiscopat et du clergé séculier, avaient, de tout temps et un peu partout, dispensé l’enseignement primaire. Organe de la doctrine catholique au même titre que la chaire elle-même, l’école qui avait eu pour berceau la maîtrise cantorale n’avait pu rester fidèle, à travers tant de siècles, au désintéressement, au dévouement qui l’avait élevée à la hauteur d’un sacerdoce. Ce sacerdoce, l’esprit mercenaire l’avait fait dégénérer en un office vénal, il avait amené ceux qui l’exerçaient à se soustraire à l’obligation de la gratuité qui était due aux enfans pauvres, à faire passer leur profit avant leurs devoirs.