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mère, que des domestiques éprouvés, et les associant, comme elle, à sa sainte vie. Sa figure même, un long visage maigre avec un menton pointu et un grand nez osseux, semble, par son caractère d’austérité, garder quelque chose de ce milieu rigide ; mais le front calme, et les yeux ouverts, francs et bons, sont bien en rapport avec la pleine sérénité de cet intérieur patriarcal.

Il fut élevé au collège de Navarre, et fit ses études avec succès. Il aurait donc pu s’avancer et se pousser dans le monde, où son instruction, sa famille et sa fortune lui auraient permis de réussir. Mais très vite il se sentit attiré vers Dieu. Encore enfant, il prenait un goût particulier aux sermons et aux instructions religieuses, si bien que ses parens avaient plaisir à voir la gravité avec laquelle il les récitait, une fois entendus. Ses humanités achevées, il rentra dans la maison paternelle où il vécut solitaire, allant suivre en Sorbonne les leçons de théologie, sans vanité comme sans ambition. Vincent de Paul fut son initiateur dans la vie religieuse et l’éducateur de son âme. Ayant eu connaissance par son ami Poinceval de la vertu et des talons du jeune étudiant en théologie, il le prit avec lui, l’employant à faire des catéchismes dans les prisons et l’occupant à l’œuvre naissante des Missions. Sous-diacre, puis diacre malgré ses résistances, — car il ne se jugeait jamais assez digne, et il ne devait consentir à se laisser ordonner prêtre qu’à l’âge de trente ans, — Pavillon fut le bras droit de Vincent de Paul. Son père étant mort, il consacra aux Missions sa part de la succession paternelle, et mieux encore son temps, sa parole et sa vie, allant prêcher lui-même dans les villages, visitant les malades et les pauvres, et bornant son ambition, le jour où Dieu l’aurait appelé au sacerdoce, à être l’obscur vicaire de quelque curé de campagne. Vincent de Paul en décida autrement, et, lorsque Pavillon eut reçu la prêtrise, il le garda auprès de lui et le chargea de diriger les conférences, et les retraites instituées, avec tant de profit pour le recrutement du clergé, dans la maison de la Mission. Il devait un peu plus tard le désigner à l’attention du cardinal de Richelieu pour le siège épiscopal d’Alet, et ce fut par lui que Pavillon, qui n’avait pu être curé de village, ainsi qu’il l’aurait souhaité, devint, comme il disait souvent lui-même, évêque de village.

La chose fait autant d’honneur à l’insistance de Vincent de Paul qu’à la modestie de Pavillon. Celui-ci, malgré sa répugnance