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— « Il m’a paru que vous m’aimiez mieux que vous n’aviez jamais fait… » — « Plus et non pas mieux. On aime mieux une chose qu’une autre, une personne qu’une autre ; mais on n’aime pas mieux une personne à un moment qu’à un autre, on l’aime plus. » — Il y aurait à discuter. Si l’auteur avait voulu dire : vous m’aimiez d’une façon plus délicate, plus profonde, plus charmante, il aurait dû dire : vous m’aimiez mieux ; et par conséquent, en sa généralité, la remarque de Valincour est fausse ; je conviens du reste qu’en ce passage, l’auteur n’a rien voulu dire autre chose que : vous m’aimiez plus fort.

— « Le bruit que j’étais amoureux… Les cuisantes douleurs que lui avait causées la pensée que… Il ne pouvait se résoudre à prendre le hasard qu’elle entendit parler… » — En vérité l’auteur aime furieusement le que après un substantif, et il en use d’une manière extraordinaire. On ne saurait ouvrir son livre sans trouver de ces sortes de façon de parler. » — Elles sont bonnes ou mauvaises selon les cas. Elles sont bonnes quand le verbe que contient, pour ainsi parler, le substantif se construit avec que ; elles sont mauvaises quand le verbe que contient le substantif ne se construit pas avec que ; ou quand le substantif ne contient aucun verbe. « Le désir qu’on vous conseille » est fort bon, parce que l’on dit « désirer que. » — « L’aspiration qu’on aille au ciel » serait fou, parce qu’aspirer ne se construit pas avec que. Dans le texte de Mme de La Fayette cité par Valincour, « la pensée que » me paraît excellent, parce que l’on dit penser que ; « le bruit que j’étais amoureux » me paraît acceptable à cause de la locution « le bruit court que ; » quant à « le hasard que, » il me paraît un barbarisme étrange.

— « Entrer à garder les secrets [prendre l’habitude de les garder]. — « Incorrect. On dit : « J’entre dans ce que vous dites pour « je le comprends, » mais entrer à garder… J’aimerais autant qu’on dît : « Elle entrait à entendre des nouvelles. »

— « Courir le cerf. » — « Jamais on n’a dit « courir le cerf. » Tous les chasseurs sont d’accord sur cela avec Vaugelas [on dit « courre le cerf. »]

— « Il lui ôta quasi toute la joie qu’il avait de se croire aimé d’elle… Il ne savait quasi si ce qu’il avait entendu n’était pas un songe… » — « Quasi si, quasi à quasi en et, en général, l’abus du quasi est blâmé par Vaugelas. » — Comparez Mme de Sévigné : « Mon Agnès pleure quasi mon départ (27 mai 1680). » Quasi