sonné : coûte que coûte, il fallait agir !… Non ! opina Anselme Truck ; mieux valait se montrer prudens, se disperser au plus vite, s’égailler à la façon des Chouans ! Quant à lui, il allait sans retard quitter ce dangereux Paris. Aurose, revenu de voyage, appuya cet avis : il retournait à Lyon… Le mirliflore et l’ancien La Tulipe prenant ainsi la poudre d’escampette, la peur devint contagieuse ; on écouta cette conseillère. Donc affaire différée, et… « patience, patience !… » renvoyée à des temps propices : mal payés, ces jacobins avaient perdu la foi…
Restait pourtant une grosse question : qu’allait-on faire du Péretti-Brutus ?
On s’était toujours méfié de ce Corse, conjuré de raccroc, mais surtout compagnon dans la grande armée de misère. Abandonné à sa détresse, le mendiant était homme à vouloir solder sa logeuse avec l’argent de la police ; il irait à « Jérusalem, » y conterait son aventure, et alors, alors… Et puis, si le Brutus parlait, d’autres frères et amis pourraient imiter son exemple. A tout prix, il fallait prévenir les délations, donner un salutaire avertissement, épouvanter les traîtres. Problème délicat à résoudre !… Mais soudain, Coin-Clément, l’endiablé de la bande, trouva la solution. Elle était des plus simples : « Citoyens, Péretti nous gêne ? Supprimons Péretti ! »
Adopté !
Ce jour-là, 24 prairial, Antonio était venu joyeux à un rendez-vous de son digne ami, le Tondu : Brutus et Scévola devaient conférer ensemble, loin des rumeurs de la ville, sous le couvert des marronniers.
La veille, Coin-Clément avait dit à ce brave :
— Peut-on toujours compter sur toi ?
— Toujours, et toujours, commandant !
— Alors, haut le cœur, camarade ! Le tyran sera frappé, après-demain. Tiens-toi prêt !
— C’est bien !… Quelles sont vos instructions ?
— Je les apporterai demain. Attends-moi donc ici, au Luxembourg, trois heures précises, sur la terrasse de droite. Nous te réservons une surprise.
De l’argent, parbleu ! Et Péretti attendait.