Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1909 - tome 51.djvu/890

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.



L’ESPOIR SUPRÊME


Qu’importe si la tombe à présent où tu dors
Et qui ne fait de toi qu’un mort d’entre les morts
N’arrête point les pas de la foule rapide
Par son urne pompeuse ou par sa pyramide ?
Et si son marbre dur ou son solide airain
N’attire pas les yeux du passant incertain
Et de ceux qui, devant les grandes destinées,
Courbent pieusement leurs têtes inclinées !
Que d’autres, pour montrer leur faste ou leur orgueil,
Sur leur cendre avec soin scellent des blocs de deuil,
Ne te suffit-il pas, à toi, que tu reposes
Sous ce cyprès aigu qu’enlacent quelques roses ?
Et, si nul ne s’attarde autour de ton tombeau,
N’est-ce donc pas assez qu’il y chante un oiseau ?
Et, si même, en un jour futur, de l’humble pierre,
Que rongera la mousse et couvrira le lierre,
Ton nom s’efface, eh bien ! que t’importe, pourvu
Que l’ombre de l’amour y pose son pied nu ?


HENRI DE REGNIER.