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des Blanchard et des Lhoste : — « Il semble qu’en vous décernant le prix Osiris, l’Académie des Sciences ait placé sur votre front un Ta Marcellus eris prophétique et que le destin soumis se soit fait un devoir de réaliser sa prédiction. » — Et pourtant, en réalité, c’est le passé plutôt que l’avenir que la docte compagnie entendait couronner, car L. Blériot se distingue des aéronautes célèbres que nous venons de citer et s’élève fort au-dessus d’eux, — qu’on nous pardonne le jeu de mots, — par ce fait que, tout en étant un homme de sport, il est aussi un ingénieur éminent.

Ses essais ne datent pas de très loin, mais il s’est montré plus méthodique que ne le prétendent certains aviateurs. Il avait commencé (1900) par imaginer une machine à ailes battantes qui, naturellement, construite en petit, donna, comme toujours, d’assez bons résultats, puis, naturellement aussi, quand on passa aux grandes dimensions, ne lui valut que des déboires. il allait abandonner l’aviation lorsque M. E. Archdeacon, que de plus en plus on peut regarder comme l’âme de la renaissance de cette science en France, lui persuada que l’avenir était dans le vol plané, et non ailleurs. A eux deux, ils construisirent un Blériot III, grand biplan, inspiré par les dessins d’O. Chanute et des frères Wright, et qui, remorqué sur la Seine par un canot à pétrole, parvint à se détacher de l’eau, mais qu’un coup de vent fit capoter. Toutefois l’élan est donné. Le biplan ne lui réussissant pas, L. Blériot se tourne hardiment du côté des monoplans. Le premier, le Canard, doué d’une très grande vitesse, arrive à quitter le sol, mais une fausse manœuvre le fait « piquer du nez » et il s’écrase (1907). Aussitôt, Blériot combine une forme plus simple, inspirée de Langley : deux couples d’ailes disposées en tandem et de petites dimensions, puisque leur surface totale ne dépasse pas 16 mètres carrés. Au premier essai, en juillet 1907, avec un moteur de 24 HP, Blériot réussit son premier vol, sur un parcours d’environ 80 mètres. Enhardi par ce succès, il prend un moteur de 60 HP qui l’enlève à 25 mètres de haut, mais le laisse en panne au bout de 300 mètres de parcours. L’aviateur tombe à pic, mais ne brise que ses ailes et son châssis — un des nombreux exemples que l’on peut citera l’appui de la thèse suivant laquelle ce genre de sport n’est pas aussi dangereux qu’on pourrait le croire. — Nouvelle chute avec le Blériot VII, dont les ailes arrière, rendues mobiles, servaient de gouvernail horizontal, à peu près comme dans le