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sur cardan ; le gouvernail de direction est commande au pied. Le châssis d’atterrissage, avec ses amortisseurs, est très léger, 30 kilogrammes au plus. Trois roues, dont l’une orientable, portent l’appareil, qui est autonome, c’est-à-dire peut prendre son vol sans rail ni pylône. Pour ceux que cela peut intéresser, ajoutons ce détail, que le centre de gravité de l’appareil n’est qu’à 0m,25 du centre de poussée. Le poids total, avec l’aviateur (80 kilogrammes) et une provision d’essence pour deux heures (30 kilogrammes), atteint 320 kilogrammes. Chaque aile porte ainsi, non pas 30 kilogrammes par mètre carré, comme il a été dit, mais 21 kilogrammes, ce qui est déjà beau, les oiseaux les plus gros ne portant pas plus de 10 à 12 kilogrammes par mètre carré. La vitesse d’origine est de 16 à 17 mètres à la seconde. Quant au moteur, c’est un moteur semi-lourd Anzani, à trois cylindres, d’une puissance de 22 HP qui, en ordre de marche, c’est-à-dire avec 30 kilogrammes d’essence, pèse 100 kilograrnmes, soit 4kg, 5 par cheval simple ; moteur d’automobile savamment allégé, avec radiateur à air, c’est à lui qu’est dû, pour une bonne part, le succès du raid du 25 juillet.

Le hameau des Baraques, aujourd’hui célèbre, est à 2 kilomètres à l’ouest de Calais et à 4 kilomètres de Sangatte, la petite station balnéaire où commencent ces dunes qui bordent le rivage de la mer jusqu’aux extrêmes confins de la Hollande, et au delà. C’est derrière le village, du côté de la terre, que, sous un hangar quelconque, L. Blériot avait abrité son monoplan... et sa fortune. Il dormait profondément lorsqu’on vint l’avertir qu’une accalmie se produisait dans l’atmosphère, violemment troublée la veille. Levé à trois heures du matin, il procéda à un premier essai d’une dizaine de minutes, agréablement surpris par un petit vent frais venant de terre, qui ne pouvait que favoriser son entreprise.

Et à ce propos, qu’on nous permette une parenthèse : comme nous l’avons déjà fait entrevoir, l’Angleterre, par suite de la persistance des vents d’ouest sur la Manche, est, pour un ballon libre venant du continent, plus difficilement abordable que ne l’est le continent pour un ballon venant de la Grande-Bretagne. Mais n’a-t-on pas exagéré la difficulté ? Les aéronautes qui ont tenté de passer en ballon de France en Angleterre n’ont-ils pas cédé trop souvent à la tentation de partir salués par les cris d’une foule enthousiaste ? Et Blériot n’a-t-il pas eu le mérite,