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Qui semble effarouché de l’embûche traîtresse,
Mais, bientôt reparue, elle reprend sans cesse
Sa fourbe entente avec le Destin ténébreux.
Ainsi la cruauté savante de ses jeux
En nos cœurs fatigués rajeunit la souffrance.
Et c’est pourquoi, mortel, redoute l’Espérance I


CONTRE L’OURS


Regarde le danger, d’où qu’il te vienne, en face !
Quand l’ours est devant toi, ne cherche pas sa trace !
Lance ton javelot si tu l’as avec toi !
Si tu l’as, par malheur, oublié sous ton toit,
Tire ton coutelas, et que ta main soit sûre !
Et si ton coutelas n’est pas à ta ceinture.
Ne perds pas cœur : avant qu’il puisse t’approcher,
Fracasse-lui les dents d’un morceau de rocher !
Si tu n’en trouves pas, ramasse la poussière,
Jette-la des deux mains, aveugle sa colère ;
Peut-être un seul instant doit te sauver encor !
Et si, n’ayant plus rien que l’inégal effort
De tes bras désarmés contre sa lourde étreinte,
Tu te sens pris par lui, surmonte encor la crainte ;
Défends-toi ! défends-toi, tant que ton cœur battra !
Et crève-lui les yeux, quand il t’étouffera !


AUGUSTE ANGELLIER.