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réduire le credo du christianisme à ce symbole sommaire : « Dieu est Dieu et Jésus-Christ est son fils unique. » C’est aussi bref que : « Dieu est Dieu et Mahomet est son prophète ! » Pourtant, il s’en faut de beaucoup que ces deux formules épuisent tout le contenu dogmatique des deux religions. Pour être un bon Musulman, on est obligé de croire non seulement à l’existence de Dieu, Etre suprême, et à la mission divine de Mahomet, mais à l’existence des anges, du diable et des démons, au Jugement dernier, à la venue de l’Antéchrist, à la réapparition de Jésus pour préparer la fin du monde, à l’éternité des peines et des récompenses. Par-dessus tout, on doit admettre que le Coran est le Livre révélé, et les conséquences en vont loin : culte des saints, des prophètes, de la Vierge Marie ; pratiques extérieures obligatoires : prières, jeûnes, ablutions, circoncision, interdiction de certaines viandes et de certaines boissons, usage du chapelet, pèlerinage à la Mecque. Je m’en tiens aux articles de foi et aux rites les plus importans ou les plus connus. On voit donc qu’il faut singulièrement en rabattre de cette simplicité tant vantée. Il n’en est pas moins vrai que les dogmes de l’Islam sont, en somme, moins nombreux et moins subtils que les dogmes du catholicisme ; et que dans la pratique, pour le troupeau des fidèles, il se ramène à un déisme grossier, adultéré de beaucoup de superstitions (magie, sorcellerie), et enfin à la croyance que les Musulmans sont le peuple élu de Dieu. Mais le résultat de cette simplification n’est pas du tout ce que nous pouvions espérer. Pour être restreinte à un petit nombre d’objets, la foi du Musulman n’en est que plus ardente. Il en est de l’Islam comme du protestantisme. Plus il allège son bagage mystique, plus âprement il en conserve le résidu. Ces symboles raccourcis sont les pires levains de fanatisme.

Il ne faut donc pas s’étonner que l’Islam, malgré toutes les avances que nous lui faisons, ne désarme point. Son hostilité irréconciliable se déguise à peine sous un masque d’indifférence et. de mépris. On la sent toujours latente, même lorsqu’elle s’enveloppe de politesse. Libre à ses défenseurs et à ses amis d’exalter la tolérance, la douceur, la bonté du Mousslim ! Je pourrais moi-même chanter ma partie dans ce chœur de louanges. Mais des vertus individuelles ne sauraient entrer en ligne de compte, quand il s’agit de déterminer les tendances de la généralité. Là-dessus, il n’y a pas de doute possible. Au nom