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Page:Revue des Deux Mondes - 1909 - tome 53.djvu/873

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que possible par un gouvernement civil, et, dès que les circonstances le permettront, par des institutions représentatives comportant l’exercice du libre gouvernement. » Cette stipulation n’était pas « concédée. » Elle exprimait une intention arrêtée d’avance, et que le gouvernement britannique avait fait connaître dès la proclamation de l’annexion, en termes moins précis mais suffisamment explicites.

Ainsi s’affirmait une fois de plus, comme un dogme de la nation anglaise, le principe de l’émancipation des colonies de peuplement. Conservateurs et libéraux ne diffèrent à cet égard que sur des questions d’opportunité. Le parti au pouvoir en 1902 était le même qu’en 1895 ; et c’est le même ministre, impérialiste passionné, M. Chamberlain, qui, après avoir été le promoteur de la guerre par sa politique agressive, a contresigné l’accord promettant l’égalité dans l’indépendance aux vaincus comme aux vainqueurs. Le même gouvernement, trois ans plus tard, esquissait déjà un geste, timide, il est vrai, mais constituant un premier pas vers l’accomplissement de cette promesse. L’opposition libérale ayant reconquis le pouvoir quelques mois après, la réalisait dans sa plénitude en décembre 1906, par l’octroi aux colonies annexées des mêmes libertés que possèdent celle du Cap depuis 1872 et celle de Natal depuis 1893.

Les pays qui s’attardent encore dans la pratique d’une soumission complète des colonies aux volontés, voire aux caprices, de la mère patrie, fabriquent leurs législations dans les bureaux de la métropole, règlent leurs budgets, et les encombrent de fonctionnaires hostiles, par devoir professionnel, à toute initiative, ont pu trouver, dans un pareil exemple, matière à d’utiles réflexions.

C’est bien un exemple, au sens propre du mot, puisque c’est l’application d’une règle. L’Angleterre, en poursuivant son œuvre de créatrice de nations, a déployé parfois une vigueur trop impatiente des résistances, confondu ses droits avec ses intérêts, abusé de la faiblesse ou des divisions des premiers occupans. Mais, la paix rétablie et sa suprématie reconnue, elle n’a jamais imposé aux habitans de race blanche, dans ses possessions, une tutelle oppressive ou onéreuse. Qu’ils fussent de pure origine britannique, comme en Australie, anglo-française comme au Canada, ou anglo-hollandaise, comme en Afrique australe, elle leur a donné ou restitué, dès qu’il lui a paru seulement possible de le faire, le droit de se gouverner eux-mêmes. La