Page:Revue des Deux Mondes - 1909 - tome 53.djvu/889

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

impression de force et une leçon de sagesse ? Mais poursuivons.

En novembre, la Convention dut quitter Durban, — à cause de la température devenue excessive, — et se transporter au Cap. Elle y délibéra deux mois encore ; enfin, le 2 février 1909, on apprit que l’accord s’était fait sur tous les points. Le projet de Constitution fut aussitôt rendu public. La seconde phase de l’évolution allait commencer. Ce n’était pas la moins dangereuse. Les représentans des quatre colonies avaient pu, en de cordiales discussions, s’éclairer mutuellement sur la portée des concessions qu’ils devaient se faire les uns aux autres, et leur nécessité. Ils étaient soutenus par le désir d’arriver à une entente, et la crainte d’avoir à reconnaître leur impuissance les inclinait à la conciliation. Maintenant ce compromis, fruit de tant de peines, était transporté dans une autre atmosphère, celle des Parlemens coloniaux. Or, chacun de ces quatre Parlemens était l’organe des intérêts et des sentimens locaux, sacrifiés, au moins en partie, à la cause nationale. On leur demandait de prendre la responsabilité de ces sacrifices, et du même coup de se sacrifier eux-mêmes, car la Constitution proposée (on le savait avant de la connaître) n’était pas une Constitution fédérale. C’était une charte d’union intime, comme celle du Royaume-Uni de Grande-Bretagne, remplaçant les Chambres coloniales par des conseils provinciaux. Ces Parlemens auraient-ils le courage de décréter leur propre disparition ?

Ils l’eurent. Le principe unitaire ne fut même pas discuté. Cependant l’œuvre de la Convention ne devait pas sortir intacte de cette épreuve. Le Transvaal et l’Orange l’acceptèrent sans objection. Le Parlement de Natal proposa quelques amendemens destinés à garantir autant que possible ses intérêts particuliers et sa liberté d’action, n’affectant pas toutefois les élémens essentiels du projet. La colonie du Cap, ou plutôt l’Afrikander Bond, réclama au contraire d’importantes modifications. Elle voulait, notamment, maintenir aux populations des campagnes, où l’élément anglais est en minorité, les avantages électoraux dont elles avaient joui sous l’ancien régime, et supprimer l’application du principe de la représentation proportionnelle que la Convention avait introduit. La première de ces propositions était inacceptable. Ainsi que l’avait déclaré dès le début le général Botha, on ne pouvait faire l’union des colonies qu’avec le concours de la partie anglaise de la population, et on ne pouvait obtenir ce