Page:Revue des Deux Mondes - 1909 - tome 53.djvu/893

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

industrielles ; et c’est pourquoi on avait jusqu’à présent avantagé les habitans des campagnes au point de vue électoral. La Constitution, malgré l’opposition du vieux parti boër, a supprimé ces avantages. L’égalité des droits a été proclamée. Dans chaque circonscription, le nombre des élus au Parlement sera proportionnel au nombre des électeurs, et non à celui des habitans.

C’est la grande concession faite aux progressistes anglais. Elle a fait plus que de rendre l’union possible, elle a été le gage de la bonne foi des Boërs : The highest test of sincerity that we could demand, disait à Londres, en juillet dernier, sir Percy Fitzpatrick, le chef de l’opposition au Parlement de Transvaal, et l’un des plus fermes soutiens de la politique de lord Milner, de 1902 à 1906.

La question des droits électoraux des indigènes n’avait pas le même intérêt immédiat, car ces droits se réduisent en fait, jusqu’à présent, à fort peu de chose. Au Transvaal et dans l’Orange, les blancs jouissent du suffrage universel ; les natifs n’ont aucun droit politique. Au Natal, ils sont supposés en avoir, mais les règlemens locaux ne leur permettent pas de les exercer. La situation est donc la même que dans les colonies annexées. Au Cap, les hommes de couleur ont les mêmes droits que les Européens ; seulement, la qualité d’électeur est soumise à certaines conditions, notamment celle de savoir lire et écrire. En sorte, que dans cette colonie, sur 500 000 adultes indigènes ou asiatiques immigrés, il n’y a que 20 000 électeurs de race non européenne. Aucun d’eux jusqu’à ce jour n’a été élu au Parlement.

Mais, dans l’établissement de la Constitution, on avait à considérer une question de principe et à se préoccuper de son application dans l’avenir. En matière de capacité électorale, on ne peut revenir sur des concessions faites. D’autre part, la différence des conditions de l’électorat au Cap et dans les colonies annexées créait une difficulté en apparence insoluble. On ne pouvait songer à introduire au Transvaal et dans l’Orange les restrictions imposées au Cap, encore moins avoir la pensée de conférer le droit de vote sans restriction à tous les indigènes. Or, tandis que, dans la colonie du Cap, un parti influent réclamait pour ceux-ci la faculté de faire entendre leurs vœux et de défendre leurs intérêts dans le Parlement de l’Union, les colonies annexées se montraient irréductiblement opposées à toute concession de ce genre. L’entente ne put se faire que sur le maintien du statu quo,