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LE PRINCE DE BÜLOW.

qu’il convenait de profiter de ces difficultés économiques pour réveiller l’agitation politique et, en novembre 1905, sur la proposition des comités de Breslau, ils décidèrent de commencer une agitation pour la conquête du suffrage universel en Prusse et dans les Etats de l’Empire. Un mouvement de grèves assez intense favorisa cette agitation. Dès le mois de décembre, la presse conservatrice dénonça ce « complot » socialiste, dont le plan déjà se précisait. On annonçait en effet pour le 21 et le 22 janvier 1906 des manifestations concertées, avec cet ordre du jour : Contre le déni des droits du peuple ! Contre la subjugation du peuple ! à Berlin à la date fixée, 93 réunions furent tenues auxquelles prirent part 200 000 personnes, unanimes à réprouver le régime électoral prussien, dont Bismarck lui-même disait qu’il n’en est point au monde de plus misérable. Grâce à d’imposantes mesures d’ordre, la tranquillité ne fut pas sérieusement troublée, sauf à Hambourg. Peu de jours après cependant, le prince de Bülow, répondant à la Chambre des Seigneurs de Prusse à une interpellation conservatrice, déclarait : « Nous ne plions pas devant la tyrannie de la rue. Nous ne reculons pas devant les démonstrations et les menaces... Le gouvernement ne croit pas cependant nécessaire de demander une augmentation de ses pouvoirs. Mais il est décidé à user énergiquement de ceux qu’il possède. » Il ne faisait pas, il est vrai, démentir l’intention qu’on lui prêtait de proposer une réforme de la loi électorale prussienne. Mais M. de Posadowsky se déclarait hostile à tout changement de principe. Et le projet, déposé en mars, ne faisait en effet que remanier les circonscriptions, provoquant cette exclamation du Vorwærts : « On se moque honteusement du peuple ! » En avril, la Chambre des députés de Prusse repoussa par 188 voix contre 81, d’accord avec le gouvernement, la réforme que proposaient les libéraux. Le « régime de Servius Tullius » était maintenu au profit des hobereaux, comme avaient été votés, à leur bénéfice, les tarifs de 1901.

La réforme financière, rendue nécessaire par la persistance du déficit, était d’autre part impopulaire. A la fin de 1906, ou avait annoncé que les commissions du Conseil fédéral étaient d’accord pour l’établissement d’un droit d’Empire sur les successions et pour l’augmentation de certains impôts existans (bière, tabac, timbre). En novembre, la Gazette de l’Allemagne du Nord publiait une analyse détaillée du projet. La situation qu’il