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Page:Revue des Deux Mondes - 1909 - tome 54.djvu/101

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des temps d’arrêt, et comme des crans sur cette pente. Il y aura, par instans, du flottement dans la politique « professionnelle » de la monarchie. Aux premiers jours du XVIe siècle, le 28 juillet 1500, voici un arrêt du Parlement défendant au prévôt de Paris d’autoriser de nouvelles confréries, et lui proscrivant d’ouvrir une information sur les anciennes ; dans le même sens, et plus net encore, un autre arrêt, du 15 mars 1524. Mais voici mieux, et qui ménage quelque surprise à ceux qui sont flattés de penser que leur siècle, le nôtre, a le monopole des initiatives audacieuses et des nouveautés révolutionnaires, rerum novarum cupido. En 1529, éclate à Lyon une émeute, — une des plus anciennes entre les fameuses émeutes lyonnaises, si spécifiquement ouvrières, — suscitée par les confréries de compagnons qui s’étaient transformées en organisations de combat. La confrérie des imprimeurs, par exemple, élisait un capitaine, un lieutenant, des enseignes, et ses membres s’étaient affiliés à une vaste ligue qui comprenait tous les artisans lyonnais. L’affaire de 1529 ne fut d’ailleurs probablement pas sans lendemain, car une ordonnance de 1539 fait « défense à tous maîtres, compagnons ou apprentis de faire aucune congrégation ou assemblée, grandes ni petites pour quelque cause que ce soit, d’avoir aucune intelligence les uns avec les autres du fait de leur métier, à peine de confiscation de corps et de biens. » A l’idéologie près, — il est vrai que c’est tout, et que la Révolution érigea le système contre toutes les corporations, ce qui ne fut jamais pour la monarchie qu’une mesure de circonstance contre telle ou telle corporation, — n’est-ce pas, deux siècles et demi plus tôt, la loi Le Chapelier : en pleine monarchie, un texte où l’on se plaît à reconnaître l’esprit révolutionnaire, destructeur de l’association, individualiste à outrance ; et n’est-il pas, quand on y songe, permis de remarquer que peu de choses se disent ou se font en histoire qui, à quelque degré et par quelque côté, ne se répètent ; non point identiquement, parce que les circonstances varient, mais semblablement, parce que le fond de l’humanité et le fond de la réalité persistent ? — De même encore, le 28 décembre 1541, défense aux serviteurs ou compagnons imprimeurs de « suborner et mutiner la plupart des autres compagnons et de se bander ensemble. » Ajoutez, si vous le voulez, l’arrêt de 1553, l’ordonnance de 1560, l’ordonnance dite de Moulins (1566), les dispositions coercitives prises, de 1576 à 1579, contre les confréries, bien que