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Page:Revue des Deux Mondes - 1909 - tome 54.djvu/239

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tinées à devenir bientôt agressives, contre l’enseignement libre. Y a-t-il donc péril en la demeure ? L’enseignement laïque est-il vraiment menacé ? Est-il nécessaire de supprimer ou de diminuer une liberté jusqu’ici respectée, pour sauver les instituteurs de l’État et leur enseignement ? A toutes ces questions, nous répondrons avec M. Millerand : « La République n’a rien à redouter que des fautes de ses partisans. »

Le gouvernement s’inspirera-t-il de la même pensée ? Il ne suffit malheureusement pas qu’il l’ait énoncée, pour que nous en soyons sûr. Cependant, s’il veut l’apaisement et la détente, il doit aussi en vouloir les moyens. Qu’il abandonne à d’autres le soin d’agiter et de troubler les esprits à la veille des élections prochaines. Qu’il n’invente pas des complots ridicules, comme on l’a fait à la veille des élections dernières. Et s’il n’est pas assez fort pour rétablir tout de suite le scrutin de liste avec la représentation proportionnelle, qu’il laisse du moins le scrutin d’arrondissement se prononcer librement, c’est-à-dire dans le calme et dans la sécurité. Peut-être ne pouvons-nous pas, pour le moment, lui demander davantage.


On a fait de Francisco Ferrer, condamné à mort et exécuté à Barcelone, le représentant en Espagne de cette école laïque qu’on déclare en péril chez nous ; on en a fait un champion de la libre pensée ; on a voulu voir en lui un apôtre des temps nouveaux, ou même futurs, et on a assuré que c’était pour tout cela qu’il était mort. Nous n’en croyons rien. Ferrer a été un révolutionnaire et un anarchiste très actif, et certaines lettres de lui qui ont été publiées, si elles ne prouvent pas sa participation aux pires violences, ne permettent pas a priori de l’en déclarer incapable. En réalité, nous ne sommes pas très renseignés sur lui ; son nom était peu connu à la veille de son arrestation et de sa mort, et c’est même ce qui a permis aux révolutionnaires internationaux de lancer l’opinion sur son compte dans la direction qui leur convenait le mieux. Les manifestations qui se sont produites un peu partout, mais particulièrement en France et à Paris, sont venues de là. Beaucoup de ceux qui y ont pris part, le plus grand nombre même, entendaient parler de Ferrer pour la première fois, lorsqu’ils ont résolu de venger sa mémoire. Cette mémoire, nous n’avons d’ailleurs nullement l’intention de l’attaquer ici. Ferrer est mort simplement et courageusement ; s’il a eu des torts graves, il les a expiés ; laissons-le dormir en paix.

On peut bien le dire aujourd’hui que les événemens ultérieurs l’ont