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comme ils savent le faire, en gens avisés et pratiques, et leur cause sera bien près d’être entendue.

Au Nord de la ligne centrale Paris-Vallorbe-Simplon, des rêves hardis ont également voulu tirer parti du tunnel du Simplon. Mais là, les énergies combinées du canton-État de Berne et de la Compagnie du chemin de fer des Alpes bernoises ainsi que les ressources financières des banques françaises et de la Compagnie de l’Est ont déjà partiellement résolu le problème posé ; il ne s’agissait plus que de parfaire l’œuvre commencée.

Pour atteindre le Simplon à travers la partie montagneuse du canton de Berne, — l’Oberland bernois, si connu et admiré des touristes, — il fallait un second grand tunnel : ce sera celui du Lötschberg. Il est déjà en construction, et c’est un ingénieur français de grand talent, M. Zürcher, qui en dirige l’exécution.

Ligne qui est, en réalité, berno-française et doit avoir une très féconde signification, si on sait l’interpréter et la compléter. En quoi consiste ce que nous appelons ici son « interprétation ? »

C’est par le réseau de la Compagnie de l’Est qu’on doit s’acheminer vers la ligne Lötschberg-Simplon : c’est par la gare frontière de Delle que voyageurs et marchandises de France devront entrer en Suisse. Mais on est là en plein Jura, et pour traverser cette zone montagneuse à plis parallèles, les lignes ferrées suivent les vallées et font des zigzags qui allongent indéfiniment les distances. Il importe de couper ces angles. Pour gagner une abréviation sensible de cette ligne, un tunnel et un raccourci s’imposaient, le Moutier-Granges.

Raccourci et tunnel sur territoire suisse qui coûteront plus de 20 millions, mais qui ont pour la France cet incomparable avantage de faire de la ligne nouvelle la plus courte voie vers Milan, non seulement pour la France de l’Est et du Nord, mais encore pour la Belgique et pour une partie de l’Angleterre et de la Hollande. Le transit si puissant d’Anvers et de Rotterdam vers l’Italie du Nord rentre ainsi dans la sphère économique française, et les marchandises de cette origine et de cette destination devront passer sur les rails français au lieu de s’acheminer par les rails allemands comme ils le font depuis l’ouverture du Gothard.

Le grand projet aimé, soutenu, voulu par Bismarck a été réalisé au détriment des intérêts économiques français. Or, le