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les mettre à l’aise et les rendre solides. L’essor des recettes des chemins de fer, grâce au progrès de la richesse publique, fit disparaître quasi complètement le lourd fardeau des garanties d’intérêts aux grandes Compagnies de chemins de fer, lesquelles, en 1893, avaient coûté au Trésor français 93 millions, et permit même des participations du Trésor aux bénéfices de l’une des Compagnies, celle de Lyon, et des reversemens par plusieurs autres, celles d’Orléans, de l’Est et du Midi, départie des sommes avancées du chef de la garantie ; c’est de plus de 100 millions par an que le Trésor se vit ainsi soit allégé, soit enrichi, par le seul développement du trafic des voies ferrées et, en y joignant le bénéfice des conversions de dettes, le bénéfice annuel pour lui ressort à 240 millions au moins.

Ainsi, l’Etat, s’il voyait ses dépenses s’accroître, bénéficiait aussi de ressources nouvelles, considérables : une administration vigilante coordonnée eût dû faire aisément face aux premières avec les secondes.

Les dépenses nouvelles, que l’on invoque pour la justification ou l’excuse des déficits et des nouveaux impôts écrasans, n’ont, de leur côté, atteint le chiffre auquel elles s’élèvent aujourd’hui que par la légèreté ou les entraînemens des gouvernemens et des parlemens anglais et français.

Le gouvernement allemand est en partie, sans doute, responsable des exigences croissantes du budget de la marine ainsi que du budget nouveau des œuvres sociales : mais s’il a provoqué, dans ces deux directions, chez les peuples voisins ou rivaux, des dépenses considérables, il leur a donné aussi, même à ce sujet, des leçons de bon ordre qu’ils ont eu le tort de ne pas suivre. Dans son rapport général sur le budget de 1910, M. Doumer signale que le budget de la marine allemand monte à 504 millions de francs, le budget de la marine anglais à 886 millions et le budget de la marine français à 371 millions en 1910, — contre, pour celui-ci, 320 millions en 1908, — et cela, en ce qui nous concerne, « sans la mise en chantier d’aucune grosse unité nouvelle pour renforcer notre flotte ou simplement pour remplacer les unités vieillies, d’une valeur militaire insuffisante, qui ont été récemment condamnées ou qui méritent de l’être. » N’est-il pas évident que, si notre administration de la marine avait été, depuis un quart de siècle, vigilante et ordonnée, si elle n’avait pas été confiée à des hommes notoirement incompètens et négligens,