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Page:Revue des Deux Mondes - 1909 - tome 54.djvu/618

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d’un informateur aussi précieux et aussi bien placé que celui-là pour voir et savoir.

Il faut se rappeler en effet que la capitale de l’Angleterre de 1815 à 1818, fut le rendez-vous d’un grand nombre de Français. Indépendamment de Louis-Philippe d’Orléans, du Duc de Bourbon et des gens qui les entouraient, on y rencontrait, à côté des généraux Dumouriez et Danican, ces épaves des temps révolutionnaires, d’anciens officiers de l’armée impériale, d’anciens fonctionnaires de Napoléon et au-dessous d’eux, traînant la savate, toujours à court d’argent, cherchant à s’en procurer par des expédiens plus ou moins avouables, des individus notoirement tarés, qui vivent en eau trouble, assiègent l’ambassade de France de leurs offres de services, accablent de flatteries le Duc de Bourbon pour obtenir des subsides : ce sont les journalistes Pellier et Châteauneuf ; un sieur de Montbadon qui, en 1814, à Paris, a aidé au renversement de la colonne ; Dasies et Colleville, anciens complices de Maubreuil ; Fauche-Borel, le nommé Saint-Charles et sa femme, maîtresse de Dasies, intrigante éhontée, plus dangereuse encore que son mari et que son amant et enfin Maubreuil lui-même, qui, après s’être évadé de prison, est venu grossir cette écume. Ces individus mériteraient d’être chassés du pays où ils ont cherché un asile ; il ne tiendrait qu’à l’Allien Office de les faire partir. Mais, pour des motifs qui nous échappent et qui témoignent, au moins en apparence, du désir de l’Angleterre de les avoir toujours sous la main, leur présence à Londres est tolérée. Ils bénéficient de l’extraordinaire bienveillance que professe le Cabinet britannique pour les ennemis des Bourbons. Force est donc à la police française de les surveiller et d’entretenir en Angleterre des agens à cet effet.

Parmi ces agens, qui presque jamais ne se connaissent ou qui s’accusent réciproquement des pires méfaits, il en est qui ne valent pas mieux que les plus dégradés de ceux qu’ils surveillent : tel ce comte de Beaumont-Brivazac qu’on a envoyé à Londres pour se débarrasser de lui à Paris et qui, jaloux de gagner son argent, complice trop souvent des individus qu’il dénonce, entasse rapports sur rapports, mensongers pour la plupart, rédigés au gré de ses passions, de ses haines, de ses intérêts. Naturellement, la police ne les lit qu’avec défiance. Parfois, cependant, elle y trouve des indications bonnes à suivre, ce qui explique