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Page:Revue des Deux Mondes - 1909 - tome 54.djvu/625

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persuade qu’on le désire ; mais je n’entends pas pourquoi, car on ne veut sûrement pas, à la Cour, se servir de moi plus qu’auparavant ; et moi je ne voudrais pas servir tant qu’on ne révoquerait pas toutes les mesures anticonstitutionnelles qu’on a adoptées dernièrement. Je réclamerais la Charte qui est violée de toutes parts sans déguisement. Une course pour souhaiter la bonne année me paraîtrait ridicule ; et, quant au motif d’empêcher qu’on ne me croie exilé, ma foi, c’est leur affaire et non la mienne. Dites bien cela à mon ami P… S’il y avait un bon motif, une utilité quelconque à ce que j’allasse, j’irais sur la tête ; mais, en vérité, je ne vois rien de tout cela, et je vois le contraire. Toutes les troupes étrangères vont certainement quitter Paris. Je crains que ce ne soit pas pour longtemps ; on ne déguise même guère cette intention ; mais Dieu sait ce qui se passera en leur absence, et je crois que je ferai bien de me tenir hors de leur chemin. On ne veut rien de solide en France, et tout ce qu’on a dit à cet égard ne sont que des sornettes. Qu’ils y prennent garde, il y a des espions dans le monde, employés de tous côtés, pour tirer les vers du nez. »

La seconde lettre, datée du 25, confirmait la précédente :

« Quant au voyage, malgré les ordres du Courrier, je persiste à n’en pas être d’avis. Si les amis des ministres désirent que je revienne, j’y suis tout disposé ; mais il faut faire autre chose que ce qu’ils font. Quand la conduite du gouvernement est telle que je dois être en opposition, j’aime mieux être absent. Pour que ma présence pût être utile, il faudrait deux choses : la première, que j’eusse part à la confiance du Roi ; la seconde, que la conduite de son gouvernement fût de nature à ce que je pusse le seconder et le soutenir dans la Chambre : or, il n’est rien de tout cela, et mon séjour à Paris ne ferait que me placer en opposition avec le Roi et le parti dominant, m’attirer une guerre d’opinion dont je n’ai que faire, des attaques du parti dominant et toutes sortes de malignités. Je préfère rester dehors, tant qu’il n’y aura pas de motif impérieux à mon retour. Si le duc de Richelieu désire mon retour, il n’a qu’à redevenir constitutionnel, et j’arriverai avec grand plaisir. »

Bien que ce fût là le langage d’un désapprobateur, et non celui d’un prétendant, il parut nécessaire de redoubler de vigilance autour du Duc d’Orléans et de surveiller ses allées et venues. Pendant les mois d’avril et de mai 1816, les notes de