Page:Revue des Deux Mondes - 1909 - tome 54.djvu/672

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

(socialistes) déclare que l’autonomie ne peut être réalisée qu’avec l’indépendance ; la gauche et la droite, — c’est-à-dire les progressistes (sorte de radicaux) fortement mêlés de juifs polonisés, les démocrates-nationaux (opportunistes), les réalistes (conservateurs organisés en parti d’affaires), — formant bloc contre les élémens révolutionnaires, considèrent comme une chimère dangereuse la poursuite de l’indépendance.

L’aristocratie, qui se rattache pour une bonne part aux réalistes, a rédigé un programme de « politique d’intérêts, » répudiant tout séparatisme comme funeste à la Pologne parce qu’il aurait pour effet, — d’accord avec les social-démocrates allemands, — de rétablir la barrière douanière entre l’Empire Russe et le Royaume. L’industrie polonaise, qui a pour débouché des territoires de l’Empire, serait ruinée de ce fait ; l’agriculture seule bénéficierait de la main-d’œuvre inoccupée ; mais, selon les économistes, la plus-value de la propriété agricole la ferait monter au maximum à 200 millions de roubles ; tandis que la diminution des richesses placées dans l’industrie (500 millions) serait considérable ; la concurrence allemande mettrait sur le pavé 150 000 ouvriers. Le Zollverein avec la Russie lui est au contraire précieux pour la Pologne : depuis vingt-cinq ans, plus les Russes accomplissaient des progrès en Asie, plus les industriels polonais effectuaient d’affaires ; en cinquante ans l’industrie polonaise a plus que décuplé. En conséquence, la noblesse et la bourgeoisie capitalistes veulent un régime loyaliste, analogue, à celui de la Galicie autrichienne, et sont irréductiblement hostiles aux révolutionnaires. Les chefs du parti national-démocrate, — le plus considérable, — sont en général d’accord avec les réalistes sur ce point.

La majorité effective de la Pologne se rallie donc à ce programme d’autonomie non séparatiste : organisation du crédit pour l’amélioration de l’agriculture, d’une action collective avec les Russes pour éliminer les fabricans allemands du grand marché russe, organisation des cartels et des trusts de l’industrie nationale pour qu’elle reste maîtresse du marché. A la Douma, c’est cette opinion qui est exclusivement représentée par le club polonais qu’on a caractérisé « groupe des autonomistes, conservateur au point de vue social ; » on ajoute généralement « qu’il sert plutôt les intérêts des agrariens polonais ; » mais il défend aussi ceux des ouvriers des villes dont les salaires dépendent de