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de la religion était encore si prépondérante dans les écoles, les collèges, qu’on n’avait pas songé sérieusement à en exclure ni l’une ni l’autre. La Constituante avait assez à faire à fonder la liberté et l’ordre nouveau, sans aller compliquer hâtivement cette grande œuvre d’un bouleversement dans l’éducation publique. Les cahiers de 89 parlaient beaucoup de confier l’enseignement aux congrégations. Les congrégations saisissent avec empressement cette planche de salut, et le salut ne pouvait être que là. La faveur avait abandonné les ordres où l’on paraissait s’enfermer dans une solitude égoïste, et s’y occuper exclusivement de son propre salut sans penser à autrui. Les évêques eux-mêmes le constatent et semblent marcher avec l’opinion. M. de Boisgelin déclare qu’il faut viser l’utilité publique. « Ce n’est plus le temps, dit-il, où la nation peut se contenter de vertus oisives. Ces vertus ne doivent être le partage que d’un petit nombre d’hommes solitaires. Mais tes hommes assemblés doivent ressentir les intérêts de tous les hommes, et chacun doit subir la loi sociale qui dévoue tous les citoyens au service de la patrie. » C’était inviter assez nettement, — et l’archevêque d’Aix le dit expressément, — religieux et religieuses à se vouer tout entiers aux deux services publics de l’éducation et de la charité. Les congrégations le comprennent.

Nous avons entendu Ferlus exposer, au nom de la Congrégation de Saint-Maur et des Bénédictins de Sorèze, ce qu’ils faisaient et plus encore ce qu’ils comptaient faire pour l’enseignement. Parmi les religieuses, deux ordres surtout, qui tenaient avant la Révolution une foule d’écoles, les Ursulines et les Sœurs de Notre-Dame, racontent les immenses services qu’elles rendent à l’instruction primaire et secondaire, pensant que ce plaidoyer vaudra à leur institut de continuer à vivre et à faire du bien. L’ordre des Ursulines, créé en Italie, au XVIe siècle, par la bienheureuse Angèle Mérici, implanté en France au commencement du XVIIe siècle par Mlle L’Huillier de Sainte-Beuve, qui fonda le premier monastère au faubourg Saint-Jacques, n’avait pas tardé à essaimer dans notre pays. En 1790, elles étaient au nombre de neuf mille dispersées dans trois cent cinquante maisons. D’après un vœu particulier ajouté aux trois autres, elles s’engageaient à faire l’éducation des filles. Leur pratique constante était d’ouvrir un pensionnat payant et, avec le profit retiré, avec leurs dots et quelques dons, de tenir, dans une dépendance