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l’égard des fonctionnaires qui s’organisent fortement à côté de lui. Cette attitude est un peu flottante ; elle manque de précision, peut-être de fermeté. Entre les autres citoyens et les fonctionnaires, il y a, dit M. Briand, une « petite » différence. Est-elle donc aussi petite que cela ? La vérité est qu’elle est grande, mais que le gouvernement s’applique à la diminuer, afin de pouvoir conclure que les fonctionnaires, qui ont d’ailleurs les mêmes droits que les autres citoyens, doivent seulement être plus mesurés dans leurs gestes, avoir plus de tact, faire preuve de plus de discrétion. Ce sont là des conseils de morale plutôt que des prescriptions professionnelles et disciplinaires. La vraie question est de savoir dans quelle mesure les fonctionnaires ont le droit de se syndiquer ou même de s’associer à l’encontre des pouvoirs publics, et cette question ne saurait être résolue par de simples discours, quelque éloquens, quelque adroitement nuancés qu’ils puissent être. C’est pourquoi l’avenir continue de nous inquiéter. Sans admirer le gouvernement parlementaire tel qu’il est aujourd’hui pratiqué, nous tenons à son principe, avec l’espoir qu’échappant un jour aux mains des radicaux, il passera dans d’autres qui sauront en restaurer la dignité. Mais l’œuvre de réparation sera bien difficile, si tous les pouvoirs publics ont été étouffés entre des organismes devenus plus puissans qu’eux. Au lieu de la représentation du pays par un parlement élu, on aura bientôt celle des diverses professions qui, après s’être rendues indépendantes, dicteront, chacune en ce qui la concerne, la loi que des Chambres subalternisées n’auront plus qu’à enregistrer.

La Fédération nationale des fonctionnaires a décidé, au moins pour le moment, qu’elle ne se rattacherait pas à la Confédération générale du Travail. À quoi bon, en effet ? N’est-elle pas elle-même une autre Confédération générale d’une certaine sorte de travail qui ne peut s’arrêter sans suspendre la vie du pays ? Ces deux grandes puissances, qui paraissent s’ignorer aujourd’hui, s’entendront très vite lorsqu’elles y auront intérêt. De toutes les révolutions que nous voyons se faire ou se préparer autour de nous, il n’y en a peut-être pas de plus grave. Ne pouvant rien pour les enrayer, nous en aurons du moins indiqué le caractère et signalé le danger.


À mesure que les élections approchent, tout le monde s’apprête pour y jouer un rôle, et rien n’est plus légitime ; mais c’est une question de savoir quelle est la meilleure tactique à observer pour les partis et les groupemens divers qui existent dans le pays. Parmi ces