Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1910 - tome 55.djvu/181

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

donc, mon Révérend Père, que vous me ferez plaisir de m’épargner la peine des violences, à quoi pareille insolence me pousserait infailliblement. J’ai toujours estimé l’action de Vardes qui, sachant qu’un homme comme Despréaux avait mal parlé de lui, lui fit couper le nez. Je suis aussi fier que Vardes, et ma disgrâce m’a rendu plus sensible que je ne serais si j’étais à la tête de la cavalerie légère de France. »

Il était honnête, à très peu près, n’étant point du tout prouvé qu’il ait fait des faux ; mais, toujours à court d’argent, il était capable d’enlever une femme riche à main armée pour la terroriser et l’épouser ; il l’était aussi de solliciter impérieusement et « impatiemment » de l’argent des dames qui étaient ses amies ; mais tout en proclamant très haut, comme on a vu, le droit des gentilshommes aux libéralités des dames, il n’abusait pas de ce droit et, dans l’exercice qu’il en faisait, il restait dans les limites et peut-être en deçà des limites où se tenaient la plupart des courtisans de cette époque ; et s’il était capable, au premier moment, de flétrir rudement une femme qui s’était dérobée au devoir de fournir à ses dépenses, il ne lui en gardait pas rancune éternelle et reconnaissait que « la représaille » avait été un peu rigoureuse. C’était un homme très acceptable en probité selon les usages du monde où il vivait.

Ses « idées » étaient courtes et peu nombreuses, mais fermes. M. Gérard-Gailly leur consacre un chapitre et ce n’est pas la faute du chapitre s’il n’est pas long. Il a dit son avis sur l’éducation des jeunes hommes et sur l’éducation des jeunes femmes. Il veut qu’un gentilhomme soit instruit, soit lettré, et il raille ses anciens compagnons de tranchée qui « témoignaient que c’était par leur propre choix qu’ils n’avaient point d’esprit et qu’il était ridicule à un gentilhomme et surtout à un homme de guerre d’en avoir. » Il trouvait l’éducation des collèges du temps déplorable et se montrait furieux de ce que les enfans en dix ans n’y apprenaient rien du tout, sinon quelques mots latins et quelques phrases qui ne leur sont d’aucun usage. On ne saurait sur ce point que lui donner raison.

Pour l’éducation des femmes, il est beaucoup plus réactionnaire ou, si l’on veut, conservateur. Il donne très exactement la main à Molière, j’entends à celui des Femmes savantes ; car sur ce point il y a deux Molière. Avec infiniment de justesse M. Gérard-Gailly fait ici remarquer qu’au XVIIe siècle, ce sont