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Page:Revue des Deux Mondes - 1910 - tome 55.djvu/185

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cette noire satire… Il y a certaines choses qu’on n’entend jamais quand on ne les entend pas d’abord ; on ne fait point entrer certains esprits durs et farouches dans le charme et la facilité des ballets de Benserade et des Fables de La Fontaine ; cette porte leur est fermée et la mienne aussi… Il n’y a qu’à prier Dieu pour eux ; car nulle puissance humaine n’est capable de les éclairer. C’est le sentiment que j’aurai toujours pour un homme qui condamne le beau feu et les vers de Benserade et qui ne connaît pas les charmes des Fables [on dirait qu’elle insiste] de La Fontaine. »

Bussy ne s’est pas précisément mêlé à la Querelle des Anciens et des Modernes ; mais il a dit son mot sur ce sujet. Il est très net en faveur des modernes, sans du reste qu’aucune raison soit donnée par lui de cette préférence ; mais il a bien le ton décisif et cavalier de tous les jugemens de Bussy en choses littéraires : « Dites-moi des nouvelles, écrit-il à Charpentier, de notre ami Perrault et quand nous verrons son ouvrage en faveur des Modernes. Je ne suis pas une tiède missionnaire pour prêcher cet Evangile ; mais l’opinion contraire est aussi difficile à déraciner qu’une religion. Cependant, à tout bon compte, il n’y a point prescription en matière d’opinions. Je crois qu’il y a eu des siècles où les Anciens ont été jusque-là incomparables. Il y en a eu d’autres où on les a surpassés, mais où l’on n’a pas eu la hardiesse de l’examiner ni de le dire. Aujourd’hui qu’on peut soutenir cette proposition avec plus de raison qu’on n’a jamais fait, je ne doute pas qu’on la fasse recevoir et qu’on détruise bientôt en France l’entêtement qu’on a pour les Anciens, comme on a fait celui qu’on a eu pour Calvin. »

Sur le point particulier de la supériorité de la langue française sur le latin, Bussy félicite le même Charpentier « d’avoir exagéré, en quelques endroits, les beautés de notre langue et les défauts de la latine et de s’être moqué des tons affirmatifs dont les pédans louent leur langue et dénigrent la nôtre. » Il ajoute : « Vous n’avez pas seulement répondu à tout ce qu’on a dit sur ce sujet, mais encore à tout ce qu’on pourrait dire ; aussi je crois cette question vidée. » Bussy croit toujours les questions vidées et il n’a jamais le ton affirmatif. Pour ce qui est de la Princesse de Clèves, Bussy fut de l’avis de Valincour, sur les deux points principaux, sur les deux morceaux essentiels du roman, à savoir sur l’aveu de Mme de Clèves