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Page:Revue des Deux Mondes - 1910 - tome 55.djvu/683

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Paroles prophétiques et trop peu comprises, qui aboutissent seulement à une réorganisation du premier ban de la milice. L’heure n’a pas sonné encore d’un plus grand changement, et en 1901, force est de se contenter, à défaut de la réforme totale, d’un expédient : la loi sur le volontariat.

La situation de l’Europe, après une période de calme apparent, va s’aggraver. Le conflit est partout, à l’Orient et à l’Occident : bonne occasion d’obtenir du pays un effort que légitiment les circonstances. Cet effort porte d’abord sur la réfection et l’extension des fortifications d’Anvers. Les anciens remparts avant été rasés, les forts existans sont insuffisans. Tout est à créer : c’est une dépense de plus de 100 millions. Pendant des mois, le débat se prolonge, et longtemps l’échec semble certain. Le Roi pourtant intervient avec vigueur, presque avec brutalité. C’est, dit-il, « le projet le plus grand, le plus important, le plus beau que les Chambres aient eu à voter depuis 1830. » Et, en pleines fêtes du 75e anniversaire de l’indépendance (21 juillet 1905), il réclame le vote devant lequel recule le Parlement. En 1906, après une suprême mêlée, le vote est enlevé, complété bientôt par la réforme de l’artillerie. Mais ces deux lois, et la première surtout, ont une valeur d’avenir supérieure à leur valeur présente. Car, comme le remarque M. Paul Hymans, « si on a des forteresses démesurées et une armée insuffisante, on affaiblit la défense et on rompt l’équilibre des forces. » En d’autres termes, la réfection des forts appelle la réforme militaire : nul doute que Léopold II n’ait prévu et voulu cet enchaînement.

Au début de 1907, le général Hellebaut, ministre de la Guerre du Cabinet de droite, lié par conséquent au parti qui a inventé le volontariat et qui s’y tient, ne cache plus la faillite de ce système. Avant 1902, on enrôlait en moyenne 826 volontaires par an. En 1903, on en enrôla 2 686. Mais très vite l’élan se brisa et les effectifs tombèrent de la même chute. L’effectif régulier du temps de paix avait été fixé à 44 500 hommes. En 1901, il n’y avait sous les drapeaux que 42 000 hommes, et 30 000 en 1907. Quelle meilleure démonstration de l’insuffisance des ressources assurées par le volontariat à la défense nationale ? Parlant en soldat, le général Hellebaut tire la conclusion qui s’impose. « L’essai loyal » ayant échoué, il faut trouver autre chose. En novembre 1908, le ministre demande donc la nomination