se laisseraient gagner, peut-être, par un plan d’action commune contre l’ultramontanisme. Hohenlohe, par exemple, avait chance d’être attiré sur ce terrain ; on y pouvait amener, aussi, certains féodaux du parti « conservateur libre, » pareils, disait ironiquement Reichensperger, à ces groupes qui, « dans l’Enfer de Dante, se pressent derrière des girouettes. » Ce serait flatteur pour les bourgeois du nationalisme libéral, surtout pour les Israélites, de nouer aux dépens de l’église des amitiés politiques aussi nobles, aussi imprévues, et de faire bloc, contre elle, avec des collègues si bien nés.
Le 21 mars, le Reichstag s’ouvrit : les catholiques, qui savaient écouter, devinèrent dans le discours du trône une réponse implicite aux vœux qu’ils avaient émis, depuis six mois, en faveur de Pie IX : cette réponse semblait être un refus. Guillaume signifiait que l’Allemagne, garante de la paix européenne, se contenterait de s’occuper de ses propres affaires et respecterait l’indépendance de tous les autres États. Au demeurant, le discours s’élevait, d’un essor pacifique, au-dessus de toutes les discussions qui allaient troubler le nouvel Empire : tous les partis y étaient respectés, toutes les confessions aussi.
La Germania qui, depuis le 1er janvier, était à Berlin même l’organe du Centre, réclamait davantage : « Nous, catholiques d’Allemagne, y lisait-on, nous désirons la paix religieuse du plus profond de notre cœur ; mais tant que des partis, dans le pays, menacent l’église et l’école, nous ne pouvons pas nous taire, nous ne nous tairons pas. » Les catholiques se sentaient menacés, et c’est pourquoi ils allaient parler ; mais les nationaux-libéraux accentueraient ensuite les menaces, en faisant aux catholiques un grief de leurs paroles. Un choc était inévitable ; et les yeux de Bismarck, embusqués sous l’épaisse broussaille des sourcils, guettaient, sans lièvre, l’incident fatal.
Une adresse s’imposait en réponse au discours du trône : Lasker, national-libéral, en prépara le brouillon. Il était d’origine juive : dans la capitale de l’État qui, vingt-deux ans plus tôt avait été proclamé chrétien par la bouche même de Bismarck, un fils d’Israël, aujourd’hui, tenait la plume au nom du peuple, pour l’hommage solennel au roi devenu empereur. La Commission fit de légers amendemens au projet, et le porta devant l’assemblée. Une phrase était ainsi conçue : « Les jours de l’immixtion dans la vie intérieure d’autres peuples ne reviendront