Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1910 - tome 56.djvu/562

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ans, de 1671 à 1694, nous avons compté quarante et un de ces voyages, pour lesquels Louis XIV dépensa près de 200 000 livres, soit environ 1 200 000 francs de notre monnaie.

En même temps que Gassion, chargé de mission pour l’étranger, Louis XIV avait, pour la France, un autre pourvoyeur d’animaux, un nommé Couplet, qui devait fournir des bêtes indigènes à la ménagerie, et aussi à ceux des membres de l’Académie des sciences qui se livraient à des travaux d’anatomie.

A Versailles, les animaux étaient généralement reçus par Alexandre Bontemps, premier valet de chambre du Roi, qui avait été nommé, en 1665, intendant des château, parc, domaine et dépendances de Versailles. Parfois c’était le médecin Perrault que Colbert chargeait du soin de les faire placer à la ménagerie. La direction générale dépendait de la surintendance des Bâtimens du Roi, c’est-à-dire de Colbert, qui en faisait inspecter régulièrement les locaux par un « contrôleur, » le sieur Lefebvre.

La ménagerie était avant tout un établissement d’apparat qui servait non seulement à amuser Louis XIV et sa Cour, mais encore à distraire les grands personnages étrangers de passage à Versailles. Le Roi avait réglé lui-même l’ordre dans lequel il fallait faire visiter le parc, et voici ce qu’il disait pour cette partie de son domaine : « Quand on voudra visiter, le même jour, la Mesnagerie et Trianon, après avoir fait la pause auprès d’Apollon on s’yra embarquer pour aller à la Mesnagerie. » On trouvait, en effet, à la tête du grand canal, toute une flottille composée d’une frégate, de deux gondoles de Venise et de six chaloupes biscaïennes peintes chacune d’une couleur différente : rouge, verte, blanche, jaune, bleue et aurore. La frégate était un véritable petit vaisseau portant 32 canons sculptés dont un tirait à poudre ; ses cordages étaient en soie cramoisie et aurore, ses mâts ornés de banderoles de damas rouge et blanc, ses sièges couverts de soie frangés d’or. Le costume des matelots avait lui-même un air de fête ; les hommes d’équipage « portaient le justaucorps, l’habit bleu et rouge à bouton d’or, des bas et des jarretières de soie cramoisie, des cravates de mousseline et les cheveux noués d’un ruban ; les gondoliers avaient la veste de damas de Gênes cramoisi brodé d’or ou d’argent, le bonnet de velours noir, avec les bas de soie et les escarpins. »

On s’embarquait donc sur la frégate ou dans les gondoles.