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Il y faisait élever et nourrir pour lui des volailles et surtout des dindons ; or, comme il y en avait déjà un fort troupeau de ces derniers pour la table du Roi, on n’y vit bientôt plus, en fait d’oiseaux, que ces grotesques animaux. On prit même l’habitude de les conduire paître aux alentours de la ménagerie, dans le parc lui-même ; c’est ce qui les perdit. Un jour, en effet, c’était peu de temps avant sa mort, le Roi se promenait accompagné, ainsi qu’il était d’usage chaque fois qu’il sortait même à pied, de son capitaine des gardes de quartier, et suivi de douze gardes du corps et douze cent-suisses ; il passa devant la ménagerie et trouva ces bêtes. Il en témoigna son mécontentement au gouverneur qui n’en tint aucun compte ; le Roi, en repassant, les revit encore. « — Monsieur, dit-il alors à Laroche, que cette troupe disparaisse, ou, je vous en donne ma parole royale, je vous ferai casser à la tête de votre régiment. » La vérité pourtant est qu’il y avait à la ménagerie d’autres animaux que des dindons ; ses cours devaient même être bien remplies si l’on en juge par la quantité de fourrage, de grains et de paille que les animaux mangeaient chaque année. Ces alimens étaient fournis, comme ils l’avaient toujours été, par la ferme voisine de la ménagerie, dont les bâtimens se trouvaient placés entre la cour des Autruches et le chemin de Saint-Cyr. Cette ferme, qui appartenait au Roi depuis Louis XIII, occupait alors une surface de 548 arpens (200 hectares environ) en terres labourables, prés et pâture ; elle était louée 5 500 francs, à charge par l’adjudicataire de « livrer, à un prix fixe et très bas, les fourrages nécessaires à la nourriture des animaux de la ménagerie. » Or en 1742, par exemple, ce fermier avait dû livrer au capitaine Laroche « la quantité de 1 500 bottes de foin et 3 000 bottes de paille de bled, 300 bottes de paille d’avoine, 50 septiers d’orge, 75 septiers d’avoine et 10 septiers de vesce, les quatre au cent fournies pour les foins, les pailles et les graines, mesure de Paris, à raison des prix qui suivent, savoir : l’orge, 8 livres le septier, l’avoine et la vesce 10 livres le septier, le foin 20 livres le 100, la paille de bled 10 livres, la paille d’avoine 18 livres, le tout de bonne nature et qualité et provenant de ses récoltes. » En 1749, le fermier était tenu de fournir en plus, « à qui et dans les temps qui lui seront indiqués : deux poules d’Inde, deux douzaines de chapons, deux douzaines de poulets et une douzaine de canards. »