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Mais était-il possible que cette Bavière désormais « confédérée, » cette Bavière prussienne à demi, osât combattre et même vaincre, sans avoir consulté Bismarck ? Les propres temporisations de Bismarck forcèrent l’État bavarois, quelque terreur que lui inspirât le péril romain, de temporiser à son tour.


IV

Car au temps où le roi de Bavière s’était occupé du Concile, Bismarck, lui, avait affecté de s’en désintéresser et prié son ministre Arnim de rester tranquille. En fait de théologie catholique, la Bavière avait des idées ; la Prusse n’en avait point ; et laissant à l’érudit Louis de Bavière la jouissance de consulter la science, la Prusse, elle, dans le choix qu’elle ferait un jour entre le Pape et la fronde, ne consulterait que la politique. Elle avait senti surgir, dès le lendemain du Concile, certaines difficultés entre la hiérarchie romaine et les universitaires hostiles.

S’immiscer en ces disputes, n’était pas du goût de Mühler, ministre des Cultes et de l’Instruction publique, et protestant de nuance orthodoxe. Lorsque le 13 juillet le professeur Reinkens, de Breslau, s’était plaint à Berlin que sa traduction du De consideratione de saint Bernard fût déférée à une commission épiscopale, Mühler, alléguant qu’il s’agissait là de questions purement religieuses, avait refusé de faire des remontrances au prince évêque Fœrster ; et puis, le 6 août, après avoir officieusement agi sur Fœrster pour que Reinkens fût laissé en paix, il expédiait à celui-ci le bon conseil de suspendre la publication de l’écrit de polémique qu’il projetait sur l’infaillibilité. C’était d’ailleurs trop tard ; Reinkens venait de perpétrer ce nouveau délit. Mais Mühler, quelque inopportune que fût dès lors son importunité, s’était conduit en ministre pacifique, habile à pressentir les susceptibilités, soit pour les calmer, soit pour les conjurer. Il rassurait Bismarck, dès que celui-ci faisait mine de s’inquiéter.

Le 25 septembre, Bismarck, dans son étape de Ferrières, s’enquérait si les évêques avaient publié les décrets du Concile, et si l’on risquait d’en ressentir quelque préjudice politique. « Il n’y a qu’à attendre, répondait en substance le ministère des Cultes ; c’est avec le temps que les conséquences pratiques