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dans la chair allemande, » et c’est à l’Église romaine qu’il en demanderait compte, sans ménagemens ni délais. Il se disait en son cœur courroucé : Oui, les vieux-catholiques ont raison, l’Église romaine est périlleuse pour l’État ; et la preuve, c’est que le Centre existe. Il n’avait pas besoin, lui, d’argumens historiques, comme l’érudit couronné qui régnait sur la Bavière ; il avait là, sous les yeux, une réalité politique. Sa robuste main, sa main conductrice d’hommes, aspirait à maîtriser, par le simple jeu des rênes, tout l’attelage parlementaire ; et tous se laissaient conduire, sauf une demi-douzaine de rouges, justiciables du fouet, et sauf cette bande de noirs, qui n’avaient pas les préoccupations communes du reste de l’attelage. La marche de l’Empire risquait d’être cahotée, et la faute en serait aux ultramontains, la faute en serait à Pie IX.

, Immédiate fut la vengeance, à Berlin, puis à Munich. Le premier élan de colère, ainsi qu’il advient souvent, entraîna le gouvernement prussien dans une route où six mois plus tard il dut reculer, accusé par tous d’avoir fait une sottise. Une lettre officielle, le 29 juin 1871, partait à l’adresse de l’évêque Krementz : elle était signée Mühler, mais elle coïncidait avec la déception de Bismarck. L’État prussien signifiait au prélat que les leçons de religion données par le prêtre Wollmann demeuraient obligatoires pour tous les élèves du gymnase ; que ce prêtre enseignait exactement tout ce que naguère, par un commun accord entre l’État et l’Église, il avait été désigné pour enseigner ; et qu’aucune exigence nouvelle n’était admissible. Ainsi, dans une institution jadis fondée par des libéralités catholiques, dans le seul collège de la région qui ménageât aux enfans catholiques l’instruction secondaire, un enseignement religieux leur était imposé, hostile au Credo de l’évêque.

« Vous reprenez la politique de l’empereur Julien, ripostait Krementz à la Prusse, le 9 juillet : il y a des enfans que les familles ne voudront pas livrer au schisme et qu’elles ne pourront pas, faute de ressources, envoyer dans des gymnases plus lointains ; ces enfans catholiques, vous les condamnez à l’ignorance, comme Julien jadis y condamna les chrétiens. Votre décision, concluait-il, est une négation des principes suivis auparavant par la Prusse dans les questions confessionnelles : elle est un premier pas, fatal, sur une voie en pente. »