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nationaux-libéraux, les raisons quasi doctrinales apportées par Mühler marquaient un rapprochement sérieux entre le vieux-catholicisme et le gouvernement de Berlin. Dans l’incident où succombait la « division catholique, » garante active de la paix religieuse, chacun des partis hostiles à cette paix puisait finalement une force nouvelle.

Les Grenzboten signifiaient aux « ultramontains » que le Nord de l’Allemagne n’était pas un terrain pour eux, qu’ils ne devaient leur succès qu’à la complaisance du gouvernement et à la négligence des populations, mais que bientôt le sol s’effondrerait sous leurs pas. Aussi les espérances confiantes dans lesquelles Auguste Reichensperger se complaisait encore en avril étaient-elles désormais singulièrement assombries. Il adressait en août, à la Revue générale de Bruxelles, un article qui faisait grand bruit. Il ne pouvait croire possible encore que Guillaume, après avoir acheté la paix extérieure à l’aide du courage de tout le peuple allemand, laissât persécuter des millions d’Allemands et sacrifiât la paix intérieure, due surtout à son frère Frédéric-Guillaume IV. Il ne pouvait croire que l’impossibilité de vaincre des résistances morales par des mesures de police échappât longtemps à Bismarck. Mais il accusait les partis hostiles à l’Église de vouloir profiter de Sadowa, de Sedan, de la brèche de la Porte Pie, pour faire une trouée dans le catholicisme allemand, élever une Église nationale allemande et aboutir, peu à peu, à un humanisme cosmopolite, sans dogmes, sans sacremens, sans autels, idéal de la franc-maçonnerie. Et la peur qu’il avait de ces partis semblait supplanter en lui, désormais, ce qui lui restait de confiance dans l’esprit de justice du Roi et dans le flair politique du chancelier.


VI

La fermeture des bureaux dans lesquels l’Église prussienne, trente ans durant, avait familièrement causé avec l’État, coïncidait avec un article des Grenznoten, proposant à l’État, tout de suite, de nouveaux interlocuteurs, qui étaient les vieux-catholiques. « Nous espérons, écrivait Constantin Rœsler, que l’Empereur et l’Empire comprennent aujourd’hui leur devoir de protéger, contre la papauté, les défenseurs de la vraie doctrine catholique. Peut-être que par cette voie ils arriveront à soustraire