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avait vu ce prêtre assister à la messe dite par l’excommunié Michelis ; on avait rencontré sa signature au bas de la pétition qui réclamait qu’un sanctuaire de Munich fût donné à un autre excommunié, M. Friedrich, pour y célébrer le culte. La création d’une Eglise séparée n’était que la suite logique de ces premiers épisodes, et Dœllinger reculait. Dœllinger craignait de rompre irréparablement avec ces nombreux curés qu’il croyait apercevoir dans le clergé catholique romain et qui, d’après lui, n’acceptaient qu’à contre-cœur la doctrine récemment proclamée, « Pas d’Eglise particulière, pensait-il, elle élèverait ensuite des prétentions, si disproportionnées avec la réalité, qu’elles deviendraient absurdes et risibles. Nous ne devons pas nous laisser expulser de l’Eglise, nous devons encore moins en sortir, mais maintenir notre bon droit mordicus, comme civis Ecclesiæ, et résister au jésuitisme et à l’absolutisme dans l’Église comme à un produit étranger et hostile. » Dœllinger estimait que si les vieux-catholiques pouvaient s’attarder dans la communion romaine, ils déposeraient en elle le germe du repentir et de l’esprit réformateur, et que, battus dans l’assemblée des évêques, ils pouvaient agir encore, parmi les prêtres et les fidèles. « Il veut qu’on reste dans l’Eglise à la façon des gens de Port-Royal, » disait de lui un témoin. C’était là, aussi, le vouloir du ministre Lutz qui, moins brouillon que son roi, préférait la continuation de la fronde à l’explosion du schisme. « Tous les hommes de votre opinion, avait dit Lutz à Dœllinger, tous les adversaires des décrets du Vatican, ne peuvent, dans leur intérêt bien compris, rien faire de mieux que de prendre part continuellement, publiquement, à l’ensemble du service religieux catholique, et que de montrer ainsi devant le monde que leur lien avec l’Église catholique n’est pas seulement nominal, mais réel, » Devant le congrès, le plan de Lutz et de son interprète Dœllinger fut piteusement répudié : sur trois cents congressistes, il n’y eut que trois voix pour l’approuver.

A la date du 24 septembre 1871, où le congrès de Munich se sépara, l’ « Eglise vieille-catholique, » dont Dœllinger demeura l’ami sans jamais en devenir le prêtre, était définitivement fondée. Un pronunciamiento de professeurs avait la piquante audace de procéder à une création religieuse. La négation de l’infaillibilité les rattachait les uns aux autres ; et parmi ceux qui les applaudissaient et s’inscrivaient comme fidèles, beaucoup ne se