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et prévoyait que leur effort succomberait, faute d’une assise solide, ou qu’il se heurterait à l’indifférence des protestans. On leur empruntait des argumens pour parler contre l’Eglise, des prétextes pour agir contre elle ; dans ce rôle en réalité subalterne, ils firent, quelque temps durant, les importans. Ils servaient Bismarck, ils le munissaient, ils croyaient qu’entre Bismarck et Rome le chancelier avait opté pour eux. Erreur profonde ! Bismarck n’optait jamais, et se réservait toujours. Aux époques mêmes où il s’acharnait avec le plus d’iniquité contre la force romaine, l’envie de traiter avec cette force ne le quittait point ; et certainement, il avait plus de considération pour elle que pour ses adversaires vieux-catholiques. Mais il savait qu’on est souvent gêné par plus petit que soi, et son jeu, dans le second semestre de 1871, était de lancer à l’assaut du Vatican leurs bourdonnantes taquineries et de faire croire à Pie IX détrôné que l’Allemagne disposait d’un corps expéditionnaire susceptible, peut-être, d’ébranler la tiare même que depuis vingt-cinq ans il portait.


VIII

En ce même mois de septembre où Munich mobilisait contre Rome, les évêques de Prusse écrivaient à Guillaume, tous ensemble, pour se plaindre qu’au collège de Braunsberg la liberté de conscience des petits catholiques fût violée, et pour affirmer après Pie IX que la définition dogmatique ne pouvait avoir dans le domaine politique aucune conséquence fâcheuse ; ils prévenaient le Roi que dans toute l’Allemagne régnait une profonde douleur, provoquée par la plus amère et la plus dangereuse des persécutions.

Guillaume mit quarante jours à répondre, et dans sa tardive réponse, datée du 17 octobre, il laissait voir à l’endroit de ses correspondans un reste de bienveillance et beaucoup de sévérité, et semblait présenter sa sévérité même comme un écho grondeur de sa bienveillance déçue Les évêques et le Pape, disait-il, l’avaient souvent remercié pour les libertés dont jouissait l’Église en Prusse ; un message du Pape, — c’était celui du 6 mars, — lui avait donné lieu d’espérer que les catholiques appuieraient le mouvement national. Et voici qu’à l’improviste, il trouvait, sous la plume d’évêques prussiens, « les échos de ce