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REVUE DES DEUX MONDES.

A ceux qui voudront s’en assurer et mieux connaître encore le caractère de son esprit, nous recommandons la lecture d’un livre de lui dont la traduction vient de paraître en France sous le titre de Liberté de conscience et liberté de science[1]. La composition n’en est pas très méthodique, parce qu’il se compose d’études ou de discours faits à des époques différentes, mais qui pourtant se rapportent tous au même objet. M. Luzzatti est pour la liberté illimitée de la conscience et de la science, et il ne croit pas qu’elles doivent se heurter l’une l’autre. On lira surtout avec intérêt, dans son éloquente introduction, les pages qu’il consacre à notre loi de séparation de l’Église et de l’État : il en approuve le principe, mais il croit qu’elle aurait pu être mieux faite. Nous sommes pleinement d’accord avec lui sur ce point. On peut être sûr que M. Luzzatti sera au pouvoir ce qu’il a été hors du pouvoir, un esprit profondément respectueux de la liberté religieuse et un fervent admirateur de la science et de ses conquêtes. C’est tout l’opposé d’un sectaire ; c’est un homme de liberté, de tolérance et de progrès.

Il a pris pour lui le ministère de l’Intérieur, parce que tout autre choix aurait soulevé des compétitions inextricables., L’attribution d’un autre portefeuille nous intéresse particulièrement : c’est celui des Affaires étrangères. M. Luzzatti nous a donné une nouvelle marque d’amitié en le confiant à l’ambassadeur d’Italie en France. M. le marquis de San Giuliano n’était parmi nous que depuis peu de temps ; c’est à peine si on a eu celui de l’entrevoir à Paris ; mais cela lui a suffi pour laisser parmi nous des regrets qui seraient plus vifs s’il n’était pas appelé à un poste où il ne nous quittera pas tout à fait. Et enfin il est remplacé à Paris par M. Tittoni, qui a été lui-même, pendant plusieurs années, ministre des Affaires étrangères et a eu à traiter les plus grandes questions avec toutes les Puissances. Ces choix prouvent que la politique extérieure de l’Italie ne sera pas changée : elle conservera la continuité qui fait la force d’une politique, parce qu’elle crée autour d’elle confiance et sécurité.


FRANCIS CHARMES.


Le Directeur-Gérant,

FRANCIS CHARMES.

  1. Giard et Brière, éditeurs.